La typologie simplifiée des milieux (2020)

Figure 7 : Les étages de la végétation de Corse (La végétation de Corse, Gamisans, Edisud 2003)

 

Les « milieux naturels » de Corse se caractérisent par leur grande diversité. La grande variabilité de sol, d'altitude, d'exposition, de degré d'humidité crée une mosaïque de milieux, plus ou moins enchevêtrés, superposés, variant en fonction de l'historique des terrains et des contraintes liées aux conditions géographiques et altitudinales. L'action de l'homme contribue également de façon importante à cette diversité. En effet, il est encore possible d'apercevoir des reliques des activités agricoles et pastorales exercées depuis les vingt derniers siècles. Les aménagements en terrasse, par exemple, ont un impact direct sur les milieux et les espèces qui y poussent car ils réduisent la pente et retiennent une grande quantité de terre et donc d'eau et modifient ainsi les trajectoires dynamiques de la végétation.

Voir les chapitres « L'agriculture en Corse » et « Paysages et patrimoine ».

Les habitats se répartissent en fonction des espèces qui les constituent selon un gradient altitudinal allant du littoral à l'étage alpin. Le graphique ci-dessous (figure 8) illustre les principales tendances d'évolution des milieux naturels en prenant en compte la typologie de référence retenue dans le cadre du programme européen Corine Land Cover d'analyse spatiale de l'occupation des sols à partir d'images satellitaires. Les milieux représentent des ensembles plus vastes que les habitats, ils en constituent en quelque sorte le niveau générique. Formant des ensembles homogènes, ils se distinguent facilement dans le paysage et permettent une description synthétique de l'espace mettant en évidence les interactions anthropiques.

 

Le milieu montagnard

 

Le milieu montagnard de la région présente une très grande diversité d'habitats naturels : forêts de feuillus, forêts de conifères, landes oro- méditerranéennes et pelouses, pozzines, lacs, torrents et milieux associés, zones rocheuses. Les paysages montagnards ont depuis longtemps été façonnés par les pratiques culturales et pastorales. La régression de ces pratiques laisse à penser que les surfaces boisées (forêts ou maquis hauts) continueront de progresser au cours des prochaines décennies, essentiellement par dynamique naturelle. Compte tenu des pentes et des caractéristiques des zones concernées, la fermeture des paysages ne semble pas représenter un risque de même nature que dans certaines régions de France; elle peut même dans certains cas constituer un atout pour limiter l'érosion et les crues. Mais cette tendance peut néanmoins se révéler localement préoccupante à différents points de vue : 

  • sur le plan économique : accélération de la désertification, perte de potentialité touristique ;

  • sur le plan écologique : régression de certaines espèces liées aux milieux ouverts, au pastoralisme (gypaète, plantes alticoles des milieux ouverts, etc.) ;

  • sur le plan des risques naturels : augmentation de la sensibilité au feu, biomasse inflammable et disparition des discontinuités ;

  • sur le plan social : la disparition du tissu social de proximité (disparition de la société pastorale et agraire) entraîne la dégradation et la fermeture paysagère avec une diminution de l'accessibilité et de l'appropriation par le grand public.

Dans ces conditions, et pour certains espaces sensibles qui correspondent le plus souvent à d'anciens terrains agricoles (châtaigneraies, pâturages, estives, etc.) l'intérêt d'une politique volontariste de reconquête ou d'entretien apparaît évident, même si elle ne peut pas s'envisager que sur de simples critères écologiques.

Néanmoins la présence d'un couvert forestier constitue un atout majeur en Méditerranée. Elle permet de protéger les ressources en eau et de lutter contre l'érosion. Atout par ailleurs incontestable pour tamponner les effets des températures extrêmes face aux changements globaux. De plus, ces milieux forestiers constituent des biotopes à part entière et donc liés à un équilibre Flore/Faune en particulier lorsque ces milieux sont anciens et évolués (ex : vieilles forêts matures). Les jeunes boisements sont généralement plus pauvres en biodiversité. Il est à noter que la Corse est l'île la plus boisée de Méditerranée.

 

La forêt et le maquis

 

Figure 8 : Occupation des sols selon Corine Land Cover en 2018
(Agence européenne de l'environnement - Copernicus)

La forêt

Typiquement méditerranéennes en bordure de mer et à basse altitude, avec une prédominance des essences feuillues sempervirentes et sclérophylles, en particulier le chêne vert, les forêts acquièrent un caractère montagnard au-dessus de 1.000 m, domaine du pin laricio et du hêtre puis à l'étage sub- alpin des aulnes nains. La conjonction de l'insularité, du climat, du relief et de la géologie leur confère une grande diversité biologique et écologique (sittelle corse, bec croisé des sapins, plusieurs espèces de chauves-souris, insectes saproxyliques...). On y rencontre un gradient important d'écosystèmes avec des cortèges floristiques allant des espèces thermo-méditerranéennes aux espèces alpines et qui se traduit dans la variété des types de formations végétales: futaies résineuses d'altitude à pin laricio, forêts feuillues de montagne (hêtraies, châtaigneraies), forêts résineuses de plaine ou de basse colline à pin maritime, yeuseraies de plaine et de moyenne montagne souvent établies sur d'anciens terrains agricoles, suberaies, ripisylves, continues en amont et discontinues car dégradées dans les basses vallées alluviales, etc. Le réchauffement climatique selon les scenarii plus ou moins pessimistes aura de toute façon des conséquences à tous les étages de végétation en fragilisant les stations (hêtres, sapins, pins laricios, chênes verts et lièges). 

Le maquis

Le terme générique de « maquis » désigne des formations végétales arbustives plus ou moins élevées, à feuilles dures et persistantes, caractéristiques des régions à climat méditerranéen dont la hauteur peut varier de 0,5 à 7 m selon le stade de dégradation (ou d'aggradation).

En Corse, les maquis couvrent des surfaces importantes aux étages thermo et mésoméditerranéen, plus réduites à l'étage supraméditerranéen.

On distingue cinq types de maquis en fonction de la composition floristique et de la taille de la végétation. Les maquis correspondent aux stades de succession, c'est-à-dire de reconstitution de la végétation, après divers impacts (incendies, coupes de bois, abandon de surfaces cultivées, etc.). Ils sont animés de dynamiques progressives (en général lors du recul de la présence humaine, des maquis vers les milieux forestiers) ou régressives (des forêts vers des formations plus basses, souvent sous l'action de l'homme : mise en culture, incendies, sur-pâturage). Dans sa forme la plus dégradée, le maquis est composé d'étendues quasi mono-spécifiques à ciste de Montpellier. À un stade âgé, le maquis forestier s'apparente à de la forêt où l'arbousier, la bruyère arborescente et le chêne vert dominent en beaux peuplements. Le stade ultérieur de forêt de chênes verts denses est beaucoup moins inflammable.

Les surfaces de ces différents maquis évoluent positivement avec le recul de l'élevage mais également la modification des pratiques depuis une centaine d'années. Le constat fait pour le milieu montagnard vaut pour le maquis, en particulier pour la protection des sols, l'écoulement des eaux et également pour les risques décuplés d'incendies du fait de l'augmentation spectaculaire de la biomasse très inflammable.

 

Voir le chapitre « Risques naturels »

 

Un des bénéfices attendus est l'augmentation notable des volumes de bois exploitables pour le bois de chauffage, très recherché.

La biodiversité sans être affectée gravement, subit depuis une cinquantaine d'années des modifications quantitatives importantes (effectifs et biomasse des espèces forestières en hausse forte). Néanmoins, la progression du maquis au détriment des habitats ouverts (par exemple les pelouses, prairies...) provoque une importante diminution de la biomasse et de la biodiversité d'insectes (lesquels représentent plus de 70% de la biodiversité terrestre) sur les territoires. Les maquis jeunes et denses sont donc plutôt des milieux peu favorables ce qui génère des effets potentiellement importants, comme le montrent les évaluations réalisées par l'observatoire conservatoire des insectes de Corse (OCIC) sur certains groupes (ex : papillons de jour).

Sur un plan social, les maquis hauts forestiers, souvent impénétrables, constituent des espaces à faible appropriation sociale et ludique, si ce n'est l'activité cynégétique (chasse au sanglier).

 

Les milieux aquatiques continentaux

 

La Corse possède une diversité exceptionnelle de milieux aquatiques (torrents, rivières, lacs de montagne, fleuves, zones humides, etc.) qui forment des écosystèmes fragiles, d'autant qu'ils sont de taille réduite, au fonctionnement complexe, caractérisés par l'un des plus fort taux d'espèces endémiques d'Europe.

Les cours d'eau

 

L'originalité de la faune des eaux courantes de Corse réside dans un fort taux d'endémisme : les eaux courantes comptent plus de 200 invertébrés benthiques endémiques pour la plupart localisés dans le cours supérieur des cours d'eau et dans les sources, dont environ la moitié sont endémiques stricts de Corse ; de nombreuses lacunes faunistiques : la faune piscicole renferme également peu d'espèces autochtones : la truite fario de souche corse, menacée et inscrite sur la liste rouge de l'Union internationale pour la conservation de la nature (UICN), la truite fario de souche méditerranéenne, l'anguille, l'alose, la blennie fluviatile et l'épinoche. Néanmoins des pressions anthropiques fortes existent et mettent en péril certains milieux à forts enjeux environnementaux en particulier au regard de la libre circulation des espèces piscicoles et du transport sédimentaire.

 

Les organismes aquatiques, notamment les poissons, ont des besoins de déplacements ou de migrations (montaison et dévalaison) pour atteindre les habitats aquatiques indispensables à leur survie en période estivale ou à la réalisation de leur cycle biologique (reproduction, alimentation, abris). Parallèlement, la continuité écologique revêt également une composante physique liée au transport naturel des sédiments et des matériaux. Les matériaux charriés par le cours d'eau et qui se déposent, plus ou moins temporairement, déterminent ainsi la quantité et la qualité des habitats aquatiques disponibles pour les espèces. Les ouvrages transversaux, seuils et barrages, sont une des causes principales de l'altération des conditions de continuité et constituent un facteur de risque de non atteinte du bon état écologique. Enfin le réchauffement climatique en allongeant les durées d'étiage a déjà des conséquences sur les invertébrés endémiques qui abandonnent les stations de basse altitude et perturbent la truite, poisson d'eau froide. La restauration de la continuité des cours d'eau est aujourd'hui une priorité inscrite dans le SDAGE. Par ailleurs, le classement des cours d'eau au-titre de l'article L. 214-17 du Code de l'environnement a été acté par arrêté préfectoral et définit deux listes : 

  1. liste 1 : cours d'eau ou tronçons de cours d'eau qui seront préservés de tout nouvel ouvrage faisant obstacle à la continuité ;
  2. liste 2 : cours d'eau ou tronçons de cours d'eau pour lesquels les obstacles à la continuité doivent être équipés, gérés et entretenus dans un délai de cinq ans à compter de la publication des listes.
 

Les zones humides

Le terme « zone humide » est une notion assez récente puisqu'il faut attendre la loi sur l'eau de 1992 pour en avoir une première définition réglementaire : « terrains exploités ou non, habituellement inondés ou gorgés d'eau douce, salée ou saumâtre de façon permanente ou temporaire; la végétation quand elle existe, y est dominée par des plantes hygrophiles pendant au moins une partie de l'année ». Plus de cinq cents zones humides, couvrant environ 22.000 hectares (soit 1 % du territoire corse) sont recensées et cinq sites sont reconnus d'importance internationale (Ramsar). L'inventaire des zones humides de 2005, actualisé en 2010, permet de bénéficier d'une cartographie affinée, se traduisant par une augmentation des entités. La poursuite du travail sur les mares temporaires méditerranéennes ainsi que les cartographies des zones humides des bassins versants du Liamone et du Bevinco, réalisées en 2015, ont également permis de l'enrichir. Cet inventaire, non exhaustif, mérite d'être complété. Le SDAGE 2016-2021 rappelle la nécessité de disposer à court terme d'une cartographie des zones humides au 1:25.000 et propose de définir une stratégie afin d'assurer leur préservation (gestion contractuelle, protection réglementaire, acquisition, restauration, etc.). Les travaux d'élaboration de cette cartographie sont en cours.

 

Les lagunes et les étangs littoraux

Les lagunes sont des plans d'eau littoraux, séparés de la mer par un cordon littoral appelé lido et reliés à celle-ci par un grau. Le caractère temporaire ou permanent de ces échanges avec la mer confère aux eaux lagunaires un caractère saumâtre. Si les principales zones humides littorales de Corse se situent sur la côte orientale, celles de l'extrême Sud, de superficies certes plus petites, subissent des menaces de dégradation peut être toutes aussi importantes, voire plus, que les grandes lagunes car moins connues et donc plus vulnérables. Leur origine géomorphologique explique la profondeur et l'aspect actuel des différents types de lagunes. Ces zones d'échanges et de transferts de matières nutritives sont particulièrement favorables au développement et à la reproduction des organismes vivants terrestres, de véritables nurseries pour les poissons, crustacés et mollusques mais également des sites d'accueil exceptionnels pour l'avifaune. Ces milieux remplissent un ensemble de fonctions et de services essentiels : 

  • action tampon vis-à-vis des crues,
  • retardement de la propagation des flux
  • stockage des eaux et recharges des nappes
  • stockage des effluents naturels ou artificiels et épuration des eaux polluées
  • régulation des cycles hydrologiques et chimiques
  • stabilisation des sédiments, protection des rivages/tempêtes
  • zones d'alimentation et de reproduction de nombreuses espèces
  • habitats et refuges pour une grande variété d'espèces floristiques et faunistiques.

 

La qualité de ces milieux constitue une condition indispensable à l'exercice des activités de production qui s'y déroulent (pêche, conchyliculture) ainsi qu'à leur préservation. Il convient d'améliorer la connaissance sur leur fonctionnement et de développer des indicateurs de suivi. Pour ce faire, l'OEC a mis en œuvre en 2020 un programme d'action pour « la conservation des lagunes et zones périphériques ». A ce jour, 7 lagunes font l'objet d'études : Biguglia, Diana, Urbino, Palo, Arasu, Santa- Ghjulia et Balistra. Deux lagunes sont équipées de sondes (acquises par l'OEC. dans le cadre du Forum des GEstionnaires de Corse (FOGEC)) pour suivre en continue certains paramètres et disposer ainsi d'informations sur le fonctionnement hydrologique de ces dernières. 

Les mares temporaires 

Les mares temporaires dites « méditerranéennes », donc de type oligotrophe, occupent des dépressions plus ou moins fermées, de superficie et de profondeur variables (de 15 à 60 cm). Ces cuvettes au fond imperméable présentent un cycle hydrologique intimement lié aux fluctuations du climat méditerranéen : inondées de la fin de l'automne à la fin du printemps par les précipitations, elles s'assèchent dès le mois de mai du fait de l'évaporation. Cette alternance ainsi que le caractère oligotrophe des eaux ont favorisé l'établissement de peuplements floristiques originaux et diversifiés. Les mares temporaires, qui constituent des milieux remarquables encore méconnus, sont parmi les zones humides les plus vulnérables de Méditerranée. Très présentes dans le sud de l'île, elles se situent pour la plupart à des altitudes inférieures à 300 m. Le programme régional, piloté par l'OEC, dédié à leur conservation a permis de compléter l'inventaire (fin 2020, on recense 109 mares temporaires réparties sur 68 sites qui représentent une surface d'environ 42 ha), d'améliorer les connaissances par le biais d'étude spécifiques (flore et végétation, amphibiens, branchiopodes et fonctionnement hydrologique), de réaliser un état des lieux et de définir des orientations de gestion pour la majorité des sites, de poursuivre les suivis floristiques, hydrologiques et physico-chimiques mais également d'informer et de sensibiliser les scolaires et le grand public.

Deux chantiers de restauration ont pu être réalisés sur les communes de Porto-Vecchio et de Santo Pietro di Tenda (mise en place d'aménagements, plantations de cicatrisation et intervention sur des espèces végétales exotiques envahissantes).
 

Les tourbières

 

Les tourbières constituent un habitat exceptionnel unique en Méditerranée, qui en Corse n'est présent que sur quatre sites : Crena et Livru (commune d'Orto) en altitude et Valdo et Baglietto en plaine (commune de Moltifao). Le site de Valdo, en forêt communale de Moltifao, correspond à la plus vaste tourbière à sphaignes connue en Corse et sans équivalent en milieu méditerranéen. Elle a été reconnue au titre de la convention de Ramsar. Ces deux dernières tourbières sont situées dans l'horizon inférieur de l'étage mésoméditerranéen. Elles forment des paysages tout à fait insolites en Corse et renferment des espèces rarissimes.

 

Les forêts alluviales

 

Qu'elles soient nommées ripisylves, forêts alluviales, forêts d'inondation, etc. toutes désignent un ensemble de formations végétales (strate herbacée, arbustive, arborescente, où domine l'arbre), riveraines et en relation avec un cours d'eau, une zone humide, un marais...

Leur composition floristique et leur morphologie sont liées aux inondations plus ou moins fréquentes et / ou à la présence de nappes peu profondes. En bordure de cours d'eau, la forêt alluviale ou forêt de lit majeur se distingue du boisement de berge, situé à proximité du lit mineur. La ripisylve et le bois mort présent dans les rivières jouent des rôles essentiels dans le fonctionnement naturel de ces hydrosystèmes pour lesquels il conviendrait de mettre en œuvre des démarches de gestion effective. Leur rôle de refuge de biodiversité est très important (forte richesse et productivité biologique), cela justifie d'autant plus les actions en faveur de leur restauration.

En Corse, on les trouve sur des franges assez fines en amont des grands cours d'eau, et en aval à l'état résiduaire en fond de certaines vallées alluviales (la grande majorité des ripisylves de plaines ayant disparu au bénéfice des terres cultivées).

 

Les lacs et pozzines de montagne

 
 
Lac de Bastani, Renoso (B. Recorbet)
 

Si la Corse est connue pour son littoral exceptionnel, elle ne l'est pas moins pour la beauté des paysages qu'offrent les lacs de ses montagnes. En fonction de la définition choisie, on compte d'une quinzaine à une quarantaine de lacs sur les divers massifs de l'île. Ils présentent une grande variété en termes d'altitude, de profondeur ou de surface. Tous les lacs d'altitude de Corse sont d'origine glaciaire. On peut opposer les lacs situés dans les vallées en auge typiquement glaciaires, comme la vallée de la Restonica, aux lacs de cirque (la grande majorité des lacs corses). Les pozzines correspondent au stade de comblement avancé d'un lac de montagne. La fréquentation mal canalisée jouerait un rôle néfaste dans le maintien de ces écosystèmes. Il y a une vingtaine d'années, un état des lieux des principaux lacs de montagne corses a été réalisé. Depuis, certains ont fait l'objet d'études ou de suivis ponctuels, en particulier par le Parc naturel régional de la Corse.

Depuis 2006, l'Office de l'Environnement, avec le soutien financier de l'Agence de l'Eau RMC, et de nombreux partenaires, tels que la DREAL de Corse, le Parc Naturel Régional de Corse, la Fédération de pêche, le service d'incendie et de secours de la Haute-Corse (SIS 2B), l'Agence Française pour la Biodiversité, est engagé dans un programme « Pour la gestion durable des lacs de montagne de Corse ». Ce suivi de la qualité de ces écosystèmes permet de surveiller la dégradation de ces milieux, en particulier suite à la forte fréquentation touristique mais également dans le cadre du changement climatique. 6 lacs sont suivis annuellement. Les compartiments étudiés sont les suivants : 

  • Paramètres physico-chimiques
  • Populations algales
  • Peuplements Invertébrés Benthiques
  • Populations piscicoles.
Des sites sont équipés de sondes afin de suivre en continu certains paramètres.
 
 

Les plaines et collines exploitées

 

Située à l'étage mésoméditerranéen, l'entité « plaines et collines exploitées » comprend toutes les plaines alluviales et les collines qui les bordent. Les milieux rencontrés dans cette entité sont des prairies permanentes, des vergers et des oliveraies, et d'autres terres cultivées, en particulier le maraîchage et la viticulture. La plus importante des plaines en superficie (12 % de la surface insulaire) est la plaine orientale qui s'étend de Bastia à l'embouchure de la Solenzara. Ces milieux modifiés, offrent d'importantes zones ouvertes favorables aux plantes à fleurs (notamment prairies à orchidées sauvages), souvent en mosaïque, avec des milieux plus fermés assurant un nécessaire « refuge » pour de nombreuses espèces, notamment, de la petite faune sauvage. À titre d'exemple, ces milieux sont très favorables à la Tortue d'Hermann, au Guêpier d'Europe ainsi qu'au Milan royal, à la Pie-grièche à tête rousse ou à l'Oedicnème criard.

Les villes, villages et jardins

 

Compte tenu de la forte proximité avec les milieux naturels du tissu urbain insulaire, si les espèces présentes dans ces espaces sont parfois originales et patrimoniales, ces milieux sont plutôt marqués par la présence d'espèces très communes à large répartition (beaucoup d'introduction d'espèces exotiques) et/ou supportant bien l'anthropisation (ex : espèce rudérales...). 

Les espèces communes sont par ailleurs souvent de bons indicateurs de l'état de la biodiversité dans les zones proches : pollinisateurs, coccinelles, papillons des jardins, etc. En outre, la végétation apporte fraîcheur en été et améliore le cadre de vie. L'intégration de la nature en ville par les collectivités est donc une démarche nécessaire. Dans le cadre de la mise en œuvre de la Trame verte et bleue (TVB) en Corse des projets de type « nature en ville » voient le jour (création de jardins partagés, rénovation de jardins patrimoniaux, etc.). Dans le but d'atteindre au mieux les objectifs du « Grenelle II », il paraît ici important d'intégrer le particularisme du tissu urbain insulaire, des problématiques liées à l'urbanisation des espaces dans un contexte de changement climatique. Une réflexion importante a lieu par ailleurs sur les espèces envahissantes : détermination, localisation, suivi et contention, et bien sûr, sensibilisation à la non-introduction d'espèces exogènes. 

Aussi bien pour des opérations de création ou rénovation de jardins, de la restauration d'espaces dégradés, des substitutions aux espèces exotiques envahissantes ou pour toute autre action en faveur de la biodiversité et des pollinisateurs, il apparaît aujourd'hui indispensable de s'orienter vers des plants d'origine locale ; seuls à optimiser une adaptation facile aux conditions insulaires et à préserver la biodiversité. La filière de production locale, notamment au travers de la marque Corsica Grana ®, permet de répondre à ce type d'initiatives en Corse en termes de plants. 

Le milieux littoral rocheux et sableux

 

Le milieu littoral rocheux

 

Une grande partie des côtes de Corse est rocheuse, avec un relief plus ou moins accentué. En fonction de la morphologie (de la pente surtout) et du degré de compaction du substrat, on peut distinguer :

  • des falaises de pente et de roche variables (falaises calcaires de 25 Bonifacio, rhyolitiques de Scandola) ;
  • des plates-formes plus ou moins larges, dues à une érosion marine datant du quaternaire récent, recouvertes çà et là de dépôts détritiques (sables et graviers) plus ou moins épais (Testa Ventilegne, sud de Campomoro, etc.).

Les végétaux liés à ces milieux doivent obligatoirement posséder des adaptations physiologiques qui les rendent aptes à supporter des concentrations plus ou moins fortes en sels. Malgré ces conditions extrêmes, le littoral rocheux accueille une diversité d'espèces floristiques présentant un fort endémisme, en particulier celles du genre Limonium dont quatre sont classés en danger dans la liste rouge régionale de la flore vasculaire de Corse et font l'objet d'un Plan National d'action. Le cormoran huppé de Méditerranée, le goéland leucophée, le goéland d'Audouin, le balbuzard pêcheur et le faucon pèlerin constituent les espèces faunistiques les plus caractéristiques.

 

Le milieu littoral sableux (plages et arrière-plages)

 

Les plages de sable constituent la majorité du littoral de la côte orientale entre Bastia et Solenzara et sont ponctuelles ailleurs. Dans les secteurs à vent dominant favorable se sont constituées des dunes dont certaines sont encore bien conservées. Les plages et arrière-plages accueillent de nombreuses espèces et habitats rares et menacés comme les « dunes à genévriers », habitat prioritaire de la directive « Habitats ». Quant à l'escargot de Corse (Tyrrhenaria ceratina), il n'est connu que dans une seule station au monde, le site de Campo dell'Oro près d'Ajaccio. Plusieurs plantes dont la buglosse crispée sont classées en danger dans la liste rouge régionale de la flore vasculaire de Corse. Ces milieux sont les plus menacés en Corse (avec en prime la hausse du niveau de la mer et l'atteinte au trait de côte). Les principales menaces qui pèsent sur ces sites littoraux sont la fréquentation touristique très importante (piétinement), les installations de plage non maîtrisées, la pratique de sports motorisés (4×4, quad, etc.), l'enlèvement des bois flottés (habitat de nombreux insectes).

 

Voir le chapitre « Sports et loisirs liés à la nature ».

Les acquisitions du Conservatoire du littoral assurent une protection efficace de ces milieux mais ne représentent qu'une assez faible part des plages concernées.

 

Voir le chapitre « Paysages et patrimoine ».

 

 

Les îlots marins

 

La Corse est entourée de nombreux îlots satellites peu éloignés des côtes et de petite taille dont 111 sont colonisés par des plantes vasculaires. Plus de 80 % d'entre-eux ont des superficies comprises entre 0,1 et 5 ha. Les deux plus grandes îles, Cavallo et Lavezzu, atteignent seulement 113 ha et 66 ha. Ces îlots présentent le même substrat géologique que la Corse et n'en sont séparés que par d'assez faibles profondeurs. Ils abritent une végétation remarquable mais fragile qui a su composer avec des conditions de vie extrêmes (embruns marins) mais qui doit faire face aujourd'hui aux impacts des activités humaines. Malgré cela, certains îlots satellites conservent une grande valeur patrimoniale : 

  • deux espèces, non présentes en France continentale, ont leur unique station corse sur un îlot : l'ipomée sagittée (Ipomoea sagittata) sur l'île Lavezzu et le champignon de Malte (Cynomorium coccineum) sur l'île Ratino ; la nananthée de Corse (Nananthea perpusilla) est uniquement présente en France sur six îlots satellites et une station continentale ;
  • plusieurs îlots montrent des taxons endémiques rares, tel le silène velouté (Silene velutina), endémique corso-sarde. La faune est principalement constituée d'oiseaux marins nicheurs (goéland d'Audouin, puffin cendré, cormoran huppé de Méditerranée, etc.). Deux espèces d'amphibiens et six espèces de reptiles ont été observées sur 80 des îlots pourvus de plantes vasculaires. Les principales menaces pesant sur cette faune micro-insulaire concernent la nidification de certains oiseaux rares et menacés : dérangement des oiseaux lors des périodes de nidification et prédation des poussins par les rats. En Corse, les îlots marins bénéficient d'un statut fort de protection et de mesures de gestion dans les réserves naturelles : archipel des îles Lavezzi, archipel des îles Cerbicale, îles du Cap Corse... 

Le milieu marin

 

Figure 9 : Les milieux marins (Université de Corse, 2016)

 

Le pourtour de la Corse se caractérise par de nombreux éléments biologiques et biocénotiques liés aux caractéristiques physiques. Ainsi, le plateau continental est quasi absent sauf au nord du Cap Corse et dans une moindre mesure sur la façade orientale. 74 % du linéaire côtier est constitué de substrat dur, milieu très intéressant d'un point de vue écologique. Les connaissances concernant ces milieux ont fortement progressé au cours de la dernière décennie même si elles ne peuvent encore être considérées comme complètes. Ainsi le projet Carthamed en intégrant l'ensemble des données cartographiques existantes en privilégiant les plus pertinentes, a permis de produire une carte continue des peuplements benthiques de Corse, accompagnée d'une carte de fiabilité. Ce travail vise à permettre au gestionnaire d'identifier rapidement où se situent les lacunes et les faiblesses en termes de connaissances dans la distribution des peuplements benthiques de Corse et d'apprécier la confiance à porter aux données disponibles. Cependant, le milieu marin est soumis à un certain nombre d'aménagements, dont certains peuvent altérer les fonds riches ou sensibles (aménagements portuaires, mouillages sauvages, rejets d'effluents en mer, etc.) et déstabiliser les équilibres écologiques.

 

Plusieurs habitats marins présentent un intérêt majeur au niveau régional, il s'agit en particulier : 

  • des trottoirs à Lithophyllum, qui constituent, par leur ampleur, dans la réserve naturelle de Scandola notamment, de véritables monuments naturels;
  • des grottes sous-marines, partiellement ou totalement submergées ;
  • des forêts de cystoseires qui sont largement représentées sur les côtes rocheuses de l'île en particulier dans les zones les plus superficielles de l’étage infralittoral ;
  • des herbiers de posidonies qui occupent plus de 60 % de ces fonds infralittoraux et sont encore assez bien préservés du fait d’un aménagement contrôlé du littoral, comme l’atteste le réseau de suivi de cette espèce, initié en 2004, par l’OEC, la DREAL et l’Agence de l’Eau Rhône Méditerranée et Corse avec les scientifiques de l’université de Corse ;
  • des communautés coralligènes, qui représentent la deuxième biocénose marine clé de Méditerranée, caractéristique de l’étage circalittoral. Ces communautés comme les fonds à rhodolithes semblent présenter une extension importante en Corse.

En outre, les campagnes d’investigations récentes au niveau du Cap Corse (programmes Capcoral et Coralcorse) ont permis de mettre en évidence des structures uniques en Méditerranée vers moins 120 m : les atolls de coralligène. Ces atolls, dont la formation est évaluée à plus de 7 000 ans, résultent de mécanismes de bioconstructions et d’érosion, associés à la lente remontée des eaux depuis le dernier maximum glaciaire ; enfin, plus profondément, les campagnes Corseacan initiées par l’Agence des aires marines protégées a permis de mener une première investigation des têtes de canyons de la côte occidentale et de mettre en évidence la diversité biologique qui leur sont associées. 

 
Punta di l'Ogana, Serra-di-Ferro (G. Winterstein)
 
 
 
 
 
 

Tableau de synthèse

 
  • TR  AQ  MR
  • Caractéristiques principales
  • État des milieux
  •    Richesse et diversité des milieux et habitats tant emblématiques qu'ordinaires.
  •    Contribution forte à la production d’aménités, au cadre de vie et à la richesse patrimoniale.
  • Pressions
  •     Déprise agricole et fermeture des milieux.
  •     Impact de l’élevage extensif non raisonné sur les milieux naturels.
  •     Pressions urbanistiques et agricoles et en particulier pour les étangs de la plaine orientale sujets à l’eutrophisation.
  •     Urbanisation croissante surtout aux abords des principales agglomérations.
  •     Accroissement des surfaces urbanisées dans certains espaces littoraux sensibles en particulier plages et arrière-plages.
  •     Déséquilibre croissant de la pression anthropique entre littoral et montagne.
  •     Fréquentation de certains milieux fragiles littoraux (plages et arrière-plages) et d'altitude (pozzines, grands cols, lacs de montagne, etc.).
  •     Dégradation de certains milieux littoraux (plages et arrière-plages) et d'altitude (pozzines, grands cols, lacs de montagne, etc.) notamment par l’introduction d’espèces invasives.
  •     Impact des loisirs motorisés et non-respect de la réglementation.
  •     Augmentation des activités de plaisance en mer.
  •     Augmentation des impacts des mouillages sauvages sur les herbiers de posidonies.
  •     Augmentation de la fréquentation des grottes sous marines par la plongée de loisirs.
  •     Changement climatique induisant une fragilisation des milieux et une perte de fonctionnalité.
  • Amélioration de la connaissance
  •     Réseau naturaliste : participation du milieu associatif pour l’observation naturaliste et outils participatifs peu utilisés.
  •     Sensibilisation croissante des particuliers pour la nature.
  •     Augmentation du nombre d'actions d’information et de sensibilisation.
  •     Modernisation de l’inventaire ZNIEFF terrestre terminé, inventaire ZNIEFF marin en cours.
  •    Actualisation en 2010 de l'inventaire des zones humides (2005) mais recensement et espace de fonctionnalité des zones humides à compléter.
  •     Amélioration de la connaissance sur les zones humides : espaces de fonctionnalité des zones humides, mise en place de l’atlas des zones humides, création de l’observatoire régional des zones humides.
  •     Méconnaissances ou insuffisances de prise en compte des fonctionnalités des zones humides (milieux riches en biodiversité, régulation des eaux) et des cours d'eau.
  •     Existence d'un réseau de surveillance « posidonies ».
  •     Connaissances des habitats et espèces marines, restant à améliorer au-delà de 50 m de profondeur.
  •     Amélioration des connaissances sur les habitats, cartographie de la végétation de la Corse et rédaction du cahier régional des habitats.
  •     Évaluation environnementale des plans et programmes.
  •     Validation de l’inventaire du patrimoine géologique, minéralogique et paléontologique et poursuite de celui-ci.
  •     Mise en oeuvre du Système d'information nature et paysages.
  • Gestion des milieux
  •     Existence d’un nombre important de structures de gestion et de protection des espaces naturels (Parc naturel régional, Conservatoire du littoral, réserves).
  •      Développement du réseau d’aires protégées dans le cadre de la mise en oeuvre de la SCAP et de l’ASR.
  •     Difficultés des communes et EPCI à mobiliser l’ingénierie écologique (Natura 2000…) par manque de moyens et de formation.
  •     Mise en oeuvre de la directive cadre sur l’eau.
  •    Mise en oeuvre des mesures agro-environnementales territorialisées (MAET).
  •     Mise en oeuvre des schémas d'aménagement et de gestion des eaux (SAGE).
  •     Future mise en place de la Trame verte et bleue via le SRCE.
  •     Développement de la maîtrise foncière des zones humides : acquisitions par le Conservatoire du littoral et les collectivités ; poursuite de la politique d’acquisition des zones humides par l’Agence de l’eau.
  •     Utilisation des outils réglementaires et non réglementaires visant la préservation des zones humides.
  •     Réseau Natura 2000, approbation du document d’objectifs (DOCOB) sur de nombreux sites.

 

  Point positif ou évolution favorable  Point négatif ou évolution défavorable     Amélioration    Stabilité     Détériorat

 

 

Tortue aquatique d’eau douce, cistude d’Europe
(DREAL-SBEP B.Recorbet)

 

Cet article provient du site de Observatoire du Développement Durable de Corse
http://www.oddc.fr