Les ressources énergétiques (2020)

Les ressources locales et la consommation énergétique

Figure 27 : Bilan des consommations d'énergie primaire en 2018 (OREGES de Corse)

L'insularité et le manque de ressources énergétiques locales induit une forte dépendance en matière d'approvisionnement énergétique. Ainsi, bien que le mix électrique de la Corse se caractérise par un taux très important d'énergies renouvelables (EnR), l'île reste dépendante des approvisionnements extérieurs pour plus de 86 % de sa consommation totale d'énergie primaire en 2018 (carburants pour les transports, gaz de pétrole liquéfié pour le chauffage notamment, combustibles pour la production d'électricité, importations d'électricité via les liaisons électriques avec l'Italie et la Sardaigne...).

Le mix énergétique désigne l'ensemble des différentes sources d'énergie primaire utilisées pour la consommation finale d'une zone géographique donnée. En Corse, il inclut les énergies fossiles (produits pétroliers ou d'origine pétrolière comme le gaz de pétrole liquéfié - GPL) et des énergies renouvelables (hydraulique, solaire, éolien, biomasse). Il comptabilise toutes les énergies primaires, notamment celles consommées pour la production d'électricité, les transports, le chauffage des bâtiments, etc. Le mix énergétique de la Corse intègre également les importations d'électricité via les liaisons avec l'Italie continentale et la Sardaigne. 

La part des énergies renouvelables dans la consommation d'énergie primaire s'élève à 16,2% en 2018, si l'on intègre dans ce bilan la part des biocarburants incorporés dans le gazole et l'essence, respectivement 5 % et 7 % à destination des transports routiers. Ramenée en énergie finale, cette part augmente à 17 % pour l'année 2018. La consommation primaire est de 7.828 GWh en 2018.

 

On constate que ces quinze dernières années ont été marquées :

  • par une augmentation des consommations énergétiques de l'île jusqu'en 2011 suivie d'une stabilisation due notamment à l'effet positif des actions de maîtrise de la demande en énergie portées conjointement par la Collectivité de Corse, via l'Agence d'Aménagement durable, d'Urbanisme et d'Energie de la Corse (AUE), l'État, l'ADEME, EDF et l'Union Européenne au travers des fonds FEDER ;

  • par une hausse continue de la part des énergies renouvelables ;

  • par l'augmentation des importations d'électricité depuis la Sardaigne traduisant la mise en œuvre du Plan énergétique de la Corse qui prévoyait la réalisation de la liaison électrique « SARCO » ainsi que l'augmentation progressive de sa puissance. Cette liaison a été mise en service en 2006 et a atteint une puissance de 100 MW en 2010 ;

  • par une forte fluctuation de la production d'électricité d'origine renouvelable due à la prépondérance de l'hydroélectricité dépendante des variations annuelles des apports hydriques. Toutefois, la part des énergies renouvelables a été renforcée ces dernières années suites à la mise en service de la centrale hydroélectrique du Rizzanese (50 MW) ainsi qu'à un développement soutenu du photovoltaïque (+ 150 MW entre 2010 et 2018) ;

  • par une baisse continue des importations de GPL, de l'ordre de 32 % et une baisse de 55 % de la consommation de fioul depuis 2013 (hors correction climatique).

En 2020, les effets de la crise COVID19 sur l'économie et les modes de vie ont impacté les consommations énergétiques :

- Pour les produits pétroliers :

Comme l'indique le tableau suivant, pour l'ensemble des carburants issus du pétrole, la consommation a diminué de 19% entre 2019 et 2020 en Corse.
 

Mois 2019 2020 Evolution
2019/2021
janvier 24 750 23 853  -15,28% 
février 22 773 21 233 -9,87% 
mars 23 708 17 484  4,20% 
avril 30 292 10 403  -24,67% 
mai 32 466 17 727   
juin 36 520 25 515   
juillet 48 475 42 228   
aout 51 282 46 004   
septembre 33 301  32 631   
octobre  29 475  25 784   
novembre 21 175 18 675   
décembre  22 646 22 890   
TOTAL  376 865  304 408    
Tableau 14 : Consommation tous carburants en Corse, par mois en m3 (source : DPLC)

 

Un examen des consommations mensuelles montre que si, pour janvier et février 2020, la diminution de consommation mensuelle en glissement sur 12 mois est limitée à moins de 10% par rapport à janvier et février 2019, elle atteint 26% en mars, 66% en avril (minima historique de consommation de produits pétroliers en Corse pour une période récente : juste au dessus de 10.000 m³), 45% en mai et 30% en juin. Ensuite à partir de juillet 2020, cette consommation reste plus faible que celle du même mois de 2019, mais dans des proportions plus faibles. 

Par type de produit, on observe une baisse de la consommation d'essence et de gazole de 17 et 16% entre 2019 et 2020, avec un minima historique de consommation en avril pour ces deux produits : 1 932 m3 pour l'essence et 5 826 m3 pour le gazole. 

Pour le JET A1 (carburéacteurs, aviation civile), la diminution de consommation annuelle entre 2020 et 2019 est de 57% avec une diminution de 98,5% et 95,7% en avril et mai 2020 en glissement sur 12 mois. Le gazole non routier (BTP, agriculture, etc.) voit sa consommation diminuer de 19% de 2019 à 2020, avec une très forte diminution en glissement sur 12 mois sur les 6 premiers mois de l'année 2020, avec même une diminution de plus de moitié entre mai 2019 et mai 2020. Pour le fuel domestique, la baisse de consommation annuelle entre 2019 et 2020 a été limitée : 12,5%.
 

- Pour les consommations électriques :

 
 
Figure 28 : - Production hebdomadaire d'électricité en Corse (y compris importations) en GWh.
(DREAL d'après open-data EDF Corse)
 

Le graphique indique que la production d'électricité (y compris les importations) a été analogue à celles des années précédentes sauf entre les semaines 18 et 26, où elle a été nettement inférieure. L'examen hebdomadaire de la production électrique 2020, montre qu'entre les semaines 18 et 25 la production électrique 2020 se situe entre 80% et 89% de celle de la production moyenne de la même semaine pour les années 2016-2019. Pour quasiment toutes les autres semaines de 2020, la production moyenne se situe entre 90% et 110% de la production moyenne sur 4 années. Sur l'ensemble de l'année 2020, la baisse de production par rapport aux années 2016-2019 est de 2,7% et en dehors de la période comprise entre les semaines 18 à 25 de 0,78%, soit une quasi-égalité.

 

Le système énergétique

Figure 29 : Puissance électrique raccordée au réseau et production électrique
nette 2018 (OREGES de Corse)

L'approvisionnement de l'île en hydrocarbures est effectué exclusivement par navires. En raison du surcoût lié au transport, la consommation des produits énergétiques et en particulier des carburants (essence, gas-oil), représente un poids plus important sur l'économie locale que dans les autres régions de la France continentale. De plus, les contraintes techniques inhérentes aux infrastructures des dépôts pétroliers entraînent d'autres inconvénients en termes de sécurité d'approvisionnement, ou encore la difficulté de distribution de biocarburants tel que le SP95-E10 ou le E85. 

La distribution de gaz en Corse est effectuée après transport maritime et stockage, soit par les réseaux Engie des agglomérations d'Ajaccio et Bastia, soit par livraison directe de GPL vrac chez le consommateur, soit par bouteilles (butane et propane). 

En 2018, le parc de production d'énergie électrique en Corse totalise une puissance installée d'environ 900 MW. Les moyens de production du parc électrique sont répartis de la manière suivante : En 2018, les sources d'énergies renouvelables (EnR) couvraient 37,1 % des besoins en électricité, le thermique 35,9 %, et les liaisons électriques 27 %. Cette répartition est toutefois soumise aux variations liées aux conditions hydrologiques du fait de la part importante de l'hydroélectricité. 

Le réseau électrique à haute et très haute tension corse se compose de : 

  • 783 km de ligne à 90 000 volts ;

  • 168 km de ligne à 200 000 volts en courant continu (liaison SACOI) ;

  • 7 km de liaison sous-marine et 10 km de liaison souterraine à 150 000 volts ;

  • 27 postes de transformation 90 kV / 20 kV (ou 15 kV) et 9 postes d'évacuation.

Des études et des travaux sont engagés pour lever les contraintes qui pourraient apparaître à l'horizon 2026 : création de nouveaux postes sources, renforcement des liaisons de la région ajaccienne, renforcement de postes sources clefs pour la sûreté du système électrique à proximité d'Ajaccio et Bastia et renouvellement des contrôles commandes, création de lignes d'évacuation pour les futurs outils de production. 

Par ailleurs, les capacités du Schéma régional de raccordement au réseau des énergies renouvelables (S3REnR) approuvé le 7 juin 2016 sont saturées. Néanmoins, les raccordements des producteurs EnR peuvent toujours être mis en œuvre selon l'analyse au cas par cas des coûts propres au raccordement de chaque projet.

Ce schéma doit être mis à jour afin d'intégrer les nouveaux objectifs par filière qui seront définis dans le cadre de la révision de la Programmation pluriannuelle de l'énergie pour la Corse. Ces volumes entraîneront très vraisemblablement des investissements sur les réseaux de distribution et sur les postes sources. 

En ce qui concerne le réseau de distribution, le relief corse ne favorise pas son maillage. Les enjeux d'investissement et de maintenance sont très forts pour répondre aux exigences de qualité de l'électricité fournie. Le stock de réseau basse tension à renforcer reste important en milieu rural. La quatrième convention d'application du Programme exceptionnel d'investissements pour la Corse (PEI) intégrait une mesure relative à la remise à niveau des réseaux d'électrification rurale en complément du Fonds d'amortissement des charges d'électrification (FACE).

Dans le cadre des missions qui lui sont confiées par l'article L. 141-9 du code de l'énergie, EDF réalise, en tant que gestionnaire de réseau dans les zones non interconnectées au réseau métropolitain continental, un bilan prévisionnel de l'équilibre offre-demande d'électricité. Chaque année, le bilan prévisionnel comprend une analyse de l'évolution de l'offre et de la demande d'électricité et des besoins d'investissements en moyens de production nécessaires pour assurer la sécurité de l'approvisionnement électrique sur un horizon d'au moins cinq ans. Outre la pointe de consommation hivernale liée au chauffage, la problématique de la pointe estivale est devenue un véritable enjeu d'équilibre du système depuis 2009 du fait du développement des usages spécifiques (climatisation par exemple), du développement de la consommation des résidences secondaires, des consommations liées au tourisme, etc. Si la puissance atteinte à la pointe en été reste moins élevée qu'en période hivernale, la tenue de l'équilibre offre-demande s'avère tout aussi, si ce n'est plus, compliquée du fait de l'absence de nombreux moyens de production en période estivale : 

  • impossibilité d'importer de l'énergie par la liaison électrique sarde (100 MW) ;

  • limitation d'usage de la grande hydraulique (> 100 MW).

Figure 30 : Le système énergétique (OREGES de Corse)

 

Maîtrise de l’énergie et développement des énergies renouvelables

Parc photovoltaïque de Corte
(OEC J.Salvini)

La Corse dispose d'un important potentiel de développement des énergies renouvelables, qu'elles soient hydroélectriques, éolienne, solaire ou issues de la biomasse et leur contribution constitue un axe déterminant pour le dessin des ressources énergétiques de la Corse de demain. 

La demande électrique Corse est particulièrement sensible à l'aléa climatique. On estime que 37 % de la consommation est dépendante du climat (température, nébulosité, etc.) au travers du chauffage (24 %) et de la climatisation (13 %). Plus des deux tiers de cette consommation sont réalisés par les particuliers et le secteur du « petit tertiaire » tandis que le reste revient au « gros tertiaire » et à l'industrie. Il existe un gisement d'économies d'énergie très important dans ces différents secteurs. 

Le premier axe de la transition énergétique est la maîtrise des consommations. Sur la période 2016-2018, le bilan de mise en oeuvre de la première période de la PPE montre une diminution des consommations énergétiques dans les bâtiments de 70 GWh et une production de chaleur renouvelable de 28 GWh.

La Commission de Régulation de l'Energie (CRE) a adopté en 2019 un Cadre territorial de compensation des petites actions de MDE (maîtrise de la demande en énergie) en Corse qui définit, pour une durée de 5 ans, les actions retenues pour favoriser la maîtrise de la consommation électrique et leurs caractéristiques (nature de l'action, primes optimales, clients concernées, niveau de performance, etc.).

Les actions retenues pour le secteur résidentiel visent à accompagner : 

  • La massification des actions visant l'isolation thermique du bâti afin de diminuer considérablement les consommations des équipements de chauffage et, dans une moindre mesure, de climatisation pour les logements équipés ;

  • L'installation d'équipements performants pour le chauffage ou la production d'eau chaude sanitaire en privilégiant le recours aux énergies renouvelables thermiques telles que le bois énergie, l'eau chaude solaire ou les systèmes aérothermiques performants (pompes à chaleur, chauffe-eaux thermodynamiques) ;

  • La promotion d'équipements performants pour réduire les consommations liées à l'éclairage ou aux équipements électroménagers. 

En outre, des primes bonifiées permettent l'accompagnement des ménages habitant en zones montagneuses, des ménages les plus modestes et des bailleurs sociaux.
Les ambitions du Cadre pour les secteurs tertiaire et industriel sont d'accompagner : 

  • Les actions visant à une amélioration de l'isolation thermique afin de réduire significativement la consommation électrique liée au chauffage et à la climatisation ;

  • L'installation de chauffe-eaux solaires pour la production d'eau chaude sanitaire afin de réduire les consommations liées aux chauffe-eaux électriques ;

  • La réduction de la consommation électrique liée aux usages spécifiques en particulier par l'amélioration de la performance de l'éclairage et des process industriels.

Les objectifs détaillés du Cadre de Compensation regroupent ainsi une cinquantaine d'actions « standardisées ».

Dans sa délibération du 10 décembre 2020, la CRE a adopté des niveaux de primes standards pour les actions de rénovations globales performantes des maisons individuelles et des logements collectifs, ainsi que le bois énergie collectif.

La Corse possède des conditions exceptionnelles pour le développement de l'hydroélectricité. Le potentiel régional « sauvage » a été estimé, dans le cadre d'une étude conduite par la CDC en avril 2013, à environ 6.000.000 MWh par an, soit 20 MWh par habitant, à comparer avec le potentiel « sauvage » de 4,6 MWh par habitant de la France continentale. Si seulement un tiers de cette énergie est techniquement récupérable, il reste que ce ne sont que 8 % de ce potentiel qui sont exploités. Le classement des cours d'eau fixé par arrêté du 15 septembre 2015 réduit toutefois le potentiel estimé. Sur les 37 sites vierges identifiés, 16 sites potentiels pour une puissance totale estimée à 19 MW et un productible de 67 GWh/ an ne sont pas classés, quatre sites potentiels pour une puissance totale estimée à 5,7 MW et un productible de 22 GWh/an sont classés en liste 2 (cours d'eau sur lesquels il convient d'assurer ou de rétablir la libre circulation des poissons migrateurs et le transit des sédiments), les 17 autres sites identifiés pour une puissance totale estimée à 20MW et un productible de 84 GWh/an étant classés en liste 1 (cours d'eau sur lesquels la construction de tout nouvel ouvrage faisant obstacle à la continuité écologique est interdit). En 2019, l'AUE et l'ADEME ont lancé conjointement un appel à projets spécifiques à la petite hydroélectricité. Celui-ci visait, au travers du soutien aux études de faisabilité technico-économique, à identifier et à stimuler la réalisation de petites centrales hydroélectriques en intégrant une planification territoriale et en encourageant les démarches de financement participatif comme incité par la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte. Alors que seulement quelques projets sont en cours d'études depuis les cinq dernières années, cet appel à projets à susciter un fort engouement des porteurs de projets. On dénombre ainsi un total de 11 projets sélectionnés pour une puissance cumulée de 8,5 MW. Cela vient confirmer le potentiel significatif de la filière et son besoin d'accompagnement dédié. 

L'énergie éolienne n'a pas connu le même essor que sur le continent. La puissance installée s'élève à 18 MW depuis 2006. Les parcs en fonctionnement sur Ersa/Rogliano et sur Calenzana sont en cours de renouvellement pour une puissance sensiblement égale. Alors que plusieurs projets sont à l'étude, pour certains depuis plus de 10 ans, aucun nouveau parc éolien n'a été mis en service depuis 2006. Ces projets sont tous confrontés à l'enjeu avifaune, et plus particulièrement vis-à-vis du gypaète barbu, qui semble à ce stade un enjeu non surmonté par l'ensemble des acteurs. 

Parc éolien de Calenzana
(DREAL, B. Recorbet)

L'énergie photovoltaïque a connu en revanche un fort développement depuis 2010 en particulier grâce à des conditions tarifaires attractives et à des conditions d'ensoleillement remarquable. En décembre 2018, la filière photovoltaïque sans stockage représentait 130 MW et la filière photovoltaïque avec stockage 22,8 MW. 

Les moyens de production photovoltaïque sans stockage, comme l'éolien, qui constituent des énergies dites « intermittentes » sont soumis au seuil de déconnexion, seuil qui en limite la puissance injectée sur le réseau à 30% de la puissance appelée à tout instant. La Programmation pluriannuelle de l'énergie pour la Corse (PPE) a augmenté ce seuil à hauteur de 35% en 2018 avec un objectif de 45% en 2023.

Ainsi, les derniers appels d'offres portant sur la réalisation et l'exploitation d'installations de production d'électricité à partir de l'énergie solaire et situées dans les zones non interconnectées ont intégré des installations couplant production et stockage.

De nouveaux dispositifs de stockage seront nécessaires pour stocker de la production à une période de creux de consommation et/ou de forte production EnR (nuit ou après-midi pendant le pic de production solaire) afin de la restituer à une période de forte consommation (pointe de consommation du matin ou du soir) de manière à limiter l'appel à d'autres moyens de pointe thermiques (Turbines à Combustion). 

La production de chaleur à partir du bois énergie est majoritairement générée par les installations de chauffage individuelles des ménages (75 à 100 GWh/an) auxquelles il faut ajouter une dizaine de chaufferies collectives (environ 28 GWh/an), dont celle alimentant le réseau de chaleur de Corte. Cependant la Corse dispose d'un potentiel important de développement de cette source énergétique (avec un potentiel de multiplication par quatre de la capacité estimée à l'horizon 2050), passant par une meilleure mobilisation de la ressource en bois des forêts par une structuration de filière. 

Le développement des énergies renouvelables a fait l'objet d'une réflexion concertée approfondie dans le cadre de l'élaboration du Schéma régional climat air énergie.

 

Le Schéma régional climat air énergie (SRCAE)

La Loi portant sur l'engagement national pour l'environnement, dite loi ENE ou loi Grenelle II, promulguée le 12 juillet 2010, institue les schémas régionaux du climat, de l'air et de l'énergie (SRCAE). Il s'agit d'un document stratégique, adopté le 20 décembre 2013 par l'Assemblée de Corse, permettant de renforcer la cohérence des politiques territoriales en matière d'énergie, de qualité de l'air, et de changement climatique. Il est à noter que le SRCAE a contribué à la définition du PADDUC.

Le schéma fixe les objectifs et les orientations afférentes du territoire corse, à l'horizon 2020 et 2050, répondant aux enjeux suivants : 

  • atténuer les effets du changement climatiques et s'y adapter ;

  • prévenir ou réduire la pollution atmosphérique ;

  • valoriser le potentiel énergétique terrestre, renouvelable et de récupération en mettant en œuvre des techniques performantes d'efficacité énergétique ;

  • réduire les consommations d'énergie.

Les principaux objectifs stratégiques du SRCAE de Corse en matière énergétique sont résumés ci-dessous :

Les deux principaux leviers pour atteindre l'autonomie sont la maîtrise de l'énergie (MDE) et le développement des énergies renouvelables (EnR).

Selon les scénarios étudiés d'aide à la décision, l'effort à accomplir se répartit ainsi : deux tiers de diminution des consommations d'énergie, un tiers de développement des énergies renouvelables.

Cette politique ambitieuse, réaliste, et concertée, doit permettre l'atteinte de l'autonomie énergétique en 2050, dans le respect des compétences et des responsabilités des acteurs du territoire, en s'appuyant sur : 

  • une gouvernance renouvelée et innovante, promouvant la synergie des acteurs, l'articulation des dispositifs ;

  • une adhésion de la population, pour concrétiser la maîtrise des consommations par la sobriété et l'efficacité énergétique, à la fois dans les comportements et les modes d'organisation ;

  • la réduction des émissions polluantes qui constitue un enjeu sanitaire ;

  • le développement des énergies renouvelables ;

  • l'innovation et le développement technologique dans la gestion des systèmes énergétiques et/ou ceux à bas niveau d'émission en gaz à effet de serre et polluants atmosphériques ;

  • l'adaptation aux conséquences du changement climatique.

La programmation pluriannuelle de l’énergie

Poste électrique
DREAL-SRET, Pierre Portalier

 Le 18 décembre 2015, par décret n° 2015-1697, la Corse s'est dotée d'une Programmation Pluriannuelle de l'énergie comme prévu par l'article 203 de la loi n° 2015-992 du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte. Ce document établit les priorités d'actions pour toutes les énergies du point de vue de la maîtrise de la demande, de la diversification des sources, de la sécurité d'approvisionnement, du développement du stockage et des réseaux. Elle couvre une période de trois ans (2016-2018) et une seconde période de cinq ans (2019-2023). 

Sur la période 2016-2023, la PPE inscrit la réalisation par rapport à l'existant en 2015 de : 
  • 148 % de puissance électrique installée à partir de sources d'énergies renouvelables garanties (hors grande hydraulique) ;
  •  38 % de puissance électrique installée à partir de sources d'énergies renouvelables intermittentes ;
  •  200 % sur les gains d'efficacité énergétique.
 Ces mesures doivent porter la part des énergies renouvelables à 22 % de la consommation d'énergie finale en 2023 et 40 % de la production d'électricité.
 
L'objectif final poursuivi au travers de cette programmation s'inscrit dans le cadre de l'objectif régional d'autonomie énergétique à horizon 2050 tel que fixé par le SRCAE. Ces mesures sont complétées par un volet infrastructure essentiel à la sécurisation du système électrique de la Corse comprenant notamment une nouvelle centrale thermique dans la région d'Ajaccio et une infrastructure d'alimentation en gaz naturel des moyens de production thermiques.
 
Une première révision de la PPE pour la Corse est en cours de finalisation : elle portera sur les horizons 2023 et 2028.

Le plan climat air énergie territorial (PCAET)

Le plan climat air énergie territorial (PCAET) est défini à l'article L. 229-26 du Code de l'environnement et précisé aux articles R. 229-51 à R. 221-56.

Ce document cadre de la politique énergétique et climatique de la collectivité est un projet territorial de développement durable dont la finalité est la lutte contre le changement climatique et l'adaptation du territoire. Il doit être élaboré par les établissements publics à coopération intercommunale : 

  • de plus 50 000 habitants existants au 1er janvier 2015, avant le 31 décembre 2016 ;

  • de plus de 20 000 habitants, avant le 31 décembre 2018 ou dans un délai de deux ans à compter de leur création ou de la date à laquelle ils dépassent ce seuil.

Les collectivités non obligées peuvent élaborer un PCAET volontaire, mais qui n'aura pas de valeur juridique (notamment être pris en compte par les PLU). Le PCAET, constitué d'un bilan d'émissions de gaz à effet de serre du territoire et d'objectifs stratégiques et opérationnels en matière d'atténuation du changement climatique et d'adaptation au changement climatique, comprend également un plan d'actions. Il constitue donc à l'échelle des territoires la mise en œuvre des actions permettant d'atteindre les objectifs fixés par le SRCAE et la PPE.

Trois des quatre EPCI obligés en Corse (les communautés d'agglomération d'Ajaccio et Bastia, et les communautés de communes du Sud-Corse et de Marana Golo) vont co-signer début 2021 une déclaration d'intention de PCAET dans le cadre d'une démarche singulière de coopération qui inscrit la transition écologique au cœur d'un projet commun tout en respectant les spécificités de chaque territoire.

Le plan climat-air-énergie territorial définira, sur le territoire de l'établissement public : 

  1. Les objectifs stratégiques et opérationnels de cette collectivité publique afin d'atténuer le changement climatique, de le combattre efficacement et de s'y adapter, en cohérence avec les engagements internationaux de la France ; 

  2. Le programme d'actions à réaliser afin notamment d'améliorer l'efficacité énergétique, de développer de manière coordonnée des réseaux de distribution d'électricité, de gaz et de chaleur, d'augmenter la production d'énergie renouvelable, de valoriser le potentiel en énergie de récupération, de développer le stockage et d'optimiser la distribution d'énergie, de développer les territoires à énergie positive, de favoriser la biodiversité pour adapter le territoire au changement climatique, de limiter les émissions de gaz à effet de serre et d'anticiper les impacts du changement climatique.

 

Barrage du Rizzanese (G. Winterstein)

 

 

 

L'énergie dans les îles

La production électrique en Sicile et en Sardaigne

La Sicile et la Sardaigne connaissent un climat et des géographies proches de celles de la Corse, mais sont beaucoup plus densément peuplées : plus de 1,5 millions d'habitants pour la Sardaigne, plus de 5 millions pour la Sicile, et ont une surface de plus de 20 000 km² approximativement chacune. Les comparaisons de données énergétiques brutes n'ont par conséquent peu d'intérêt, contrairement à des comparaisons de ratios.

 

Territoire puissance installée par habitant
Corse 2,260 W
Sardaigne 2,723 W
Sicile 1,887 W

 Tableau 15 : Puissance électrique installée par habitant en Corse (2020)
Sicile et Sardaigne (2018)

 

 

Données géographiques et démographiques sur les 3 îles - Comparaison des parcs de production électrique installés, Corse, Sicile et Sardaigne

La Corse, la Sardaigne et la Sicile utilisent cinq moyens de production électrique : le thermique classique (alimenté au gaz, au charbon ou aux dérivés du pétrole), l'hydro-électricité, le solaire, l'éolien et le thermique renouvelable (biomasse/ déchets). À noter que l'Italie n'utilise plus le nucléaire comme moyen de production d'électricité, mais que la géothermie y est développée, surtout en Toscane.

Microcentrale de Calzola sur le Taravo (DREAL, SBEP)

La Corse recourt davantage à l'énergie hydro-électrique que les deux îles italiennes, où le thermique reste la principale source de l'électricité, alors que les deux îles italiennes ont plus développé l'éolien, qui représente plus de 20 % de la production électrique de chaque île. Les 3 îles sont reliées au réseau électrique européen. Le câble qui relie l'Italie à la Corse a une capacité maximale de 150 MW. Les réseaux électriques de Sicile et de Sardaigne sont reliés au réseau continental italien. Une liaison directe entre l'Italie et la Sardaigne a été mise en service en 2010. Du nom de SAPEI, elle a une capacité de 1 000 MW. Un câble électrique relie Malte à la Sicile (95km).

En 2018 la Sicile et la Corse ont été importatrices d'électricité, en Corse à hauteur de plus d'un quart des besoins locaux, en Sicile de près de 20%. Inversement la Sardaigne exporte un quart de sa production. L'électricité disponible (production plus ou moins importation/exportation) par habitant est de 6.789 kWh par an en Corse 5.612 kWh en Sardaigne et 3.789 kWh en Sicile.

 

  Corse Sardaigne Sicile
Superficie km2; 8.680 24.090 25.711
Population 2019 339.200 1.640.200 4.970.000
Densité hab/km2; 39 68 193
Climat Méditerranéen, montagnard dans l’intérieur Méditerranéen, montagnard par endroit Méditerranéen, mais montagnard dans l’intérieur
Topographie Montagneuse Plaines et montagnes/collines Plaines et montagnes
Altitude moyenne 568 m 278 m 391 m
Tableau 16 : Éléments de comparaison entre la Corse, la Sardaigne et la Sicile

 

 

  Corse % puissance de production locale Sicile % puissance de production régionale,..5 Sardaigne % puissance de production régionale,..7
Puissance totale installée 765   9.380,8   4.467,3  
Thermique 369,3 48,28 % 5.309,5 56,6 % 2.063 46,18 %
Hydraulique 223,3 29,19 % 715,2 7,62 % 461 10,32 %
Solaire 152,1 19,89 % 1,400,0 14,92 % 787,3 17,62 %
Éolien 18 2,35 % 1,888,9 20,14 % 1,050,0 2,35 %
Biomasse-déchets 2,3 0,3 % 67,2 0,72 % 106 2,37 %
 Tableau 17 : Comparaison des productions électriques, production en GWh 2018
(Sources : EDF corse, TERNA)

 

 

 

  

Tableau de synthèse

  • Caractéristiques principales
  •  Développement important de l’énergie photovoltaïque.
  •   Développement et sécurisation des réseaux.
  •   Part importante des énergies renouvelables, notamment hydroélectrique.
  •   Remplacement de la centrale thermique de Lucciana avec un fonctionnement au fioul léger.
  •   Stabilisation de la consommation d’énergie (électricité et hydrocarbures).
  •   Vétusté de la centrale thermique du Vazzio.
  •   Insuffisance des moyens de maîtrise de la demande en énergie (MDE).
  •   Difficultés de développement de la filière petite hydroélectricité.
  •   Difficultés du développement de la filière éolienne.
  • Tendances évolutives
  •   Développement des moyens de production de type énergies renouvelables (petite hydraulique, bois énergie, solaire et éolien avec et sans stockage…).
  •   Développement de la maîtrise de la demande en énergie (MDE) notamment dans le bâtiment.
  •   Remplacement de la centrale thermique du Vazzio avec un fonctionnement au gaz.
    Voir le chapitre "La qualité de l'air"
  •   Arrivée programmée du gaz naturel
  •   Développement des installations de stockage d’électricité.
  •   Insuffisance des moyens pour mettre en oeuvre des mesures de diminution de la consommation énergétique dans le secteur des transports.

 

  Point positif   Point négatif

 

 

Pour aller plus loin :

 

Titre Organisme Année
Prix des énergies – observatoire du prix des carburants ADEC / Corsica Statistica 2020
Énergie - Air – Climat AUE / OREGES 2018
Revue de dépenses, Péréquation tarifaire de l’électricité avec les zones non interconnectées CGEDD, CGEIET 2017
Approvisionnement (l’) en gaz naturel de la Corse CGEDD, CGEIET, CGAAER 2016
Overview of the energy situation of French islands and focus on the Corsican situation, G, Notton, JL. Duchaud, ML. Nivet, C. Voyant, and A. Fouilloy In Clean Energy in European Islands, Athenes, Greece 2018
The electrical energy situation of French islands and focus on the Corsican situation G, Notton, JL. Duchaud, ML. Nivet, C. Voyant,K Chalvatzis , and A. Fouilloy In Renewable Energy 2019
Hybrid Renewable Power Plant Sizing - Graphical Decision Tool, Sensitivity Analysis and Applications in Ajaccio and Tilos, G, Notton, JL. Duchaud,A. Fouilloy, and C. Voyant, in Applied Energy 2019

 

 

 

Cet article provient du site de Observatoire du Développement Durable de Corse
http://www.oddc.fr