Logement et urbanisation durables (2020)

L'exode rural a caractérisé la Corse jusqu'à la fin des années 1960, dépeuplant les zones rurales et les villages de montagne pour regrouper les populations dans des zones urbaines. Il semble toutefois que ce processus soit arrivé à son terme : avec près de 335.000 habitants en 2017, la Corse a vu sa population progresser de 40 % depuis 1982 tandis que son parc de logements (résidences principales + résidences secondaires + logements vacants) a augmenté de 86 % au cours de la même période 1. De plus entre 2009 et 2018, plus de 2.400 hectares ont été urbanisés en Corse selon les données de l'observatoire national de l'urbanisation des sols.

Ce phénomène a bouleversé la géographie humaine corse en raison de son ampleur, de l'importance de l'étalement urbain et du manque de règles cohérentes à l'échelle des territoires. En l'absence de grands complexes industriels et d'importantes infrastructures de transport, l'urbanisation est, parmi les activités humaines, celle dont l'impact environnemental est le plus marquant et le plus difficilement réversible. En l'espace d'une génération, le patrimoine bâti non traditionnel de la Corse a augmenté de façon massive. Cette évolution est souvent ressentie négativement dans une île dont le patrimoine environnemental est reconnu comme de grande valeur et en grande partie préservé. L'impact paysager et environnemental des constructions, trop souvent précédées d'importants travaux de terrassement, est accentué par la vigueur du relief qui les rend visibles de très loin, et par la fragilité des espaces naturels. Le patrimoine naturel étant une des richesses principales de la Corse, l'urbanisation des trois dernières décennies et la spéculation qui l'a accompagnée, sont donc surtout perçues de façon négative.

Pourtant, il n'en a pas toujours été ainsi. Jusqu'au XIXe siècle, les constructions participaient positivement à l'environnement grâce à une implantation respectueuse du relief et des terres cultivables, des dimensions limitées et des matériaux issus de carrières proches, des murs de soutènement qui structuraient les jardins empêchaient l'érosion et favorisaient la végétation. La cohérence de ce type d'habitat était assurée par un réseau de chemins et de passages qui mettaient l'espace et les lieux publics à la disposition de tous.

L'objectif à poursuivre en matière de logements et d'urbanisation sera de concilier la nécessité absolue d'offrir à la population un logement décent et celle de préserver le patrimoine naturel. Bien que ces deux objectifs aient pu apparaître comme antinomiques dans un passé récent, ils devraient à présent pouvoir converger. C'est-à-dire que les travaux effectués par les hommes pour aménager leur cadre de vie, pourraient concourir, in fine, à la valorisation du patrimoine environnemental dont ils font eux-mêmes partie.

Lors de sa visite en Corse d'avril 2019, le Président de la République et plusieurs élus ont eu à Cozzano des échanges au sujet de l'empilement législatif et réglementaire à l'origine de leurs difficultés en matière d'urbanisme. Les différentes lois et règles relatives au littoral, à la montagne, à l'environnement ou à l'agriculture viennent en effet s'additionner dans de nombreuses communes corses. Ces échanges ont donné lieu à des visites techniques sur le terrain en avril-mai 2019, et à la présentation de pistes de solutions aux élus le 3 juillet à Ponte Leccia, en présence du Premier Ministre. Il appartient aujourd'hui aux services de l'État, à la Collectivité de Corse et aux associations de maires de travailler à la déclinaison de ces pistes de solutions, dans un cadre partenarial, et avec le concours du Ministère de la Transition écologique. 

 

LOGEMENT ET ÉVOLUTION DÉMOGRAPHIQUE

 

Une démographie qui évolue de façon contrastée géographiquement, avec une croissance globale de population rapide actuellement

La population de l'île croit depuis le milieu du XXe siècle, après un minima de population en dessous de 200.000 habitants entre 1900 et 1950, avec néanmoins depuis plusieurs décennies des différences d'évolution démographiques importantes en fonction de la géographie : les deux principales agglomérations (Ajaccio, Bastia) se développent rapidement, notamment en périphérie, le littoral s'urbanise et se développe avec le développement du tourisme de masse et en même temps la plupart des villages de l'intérieur voient au mieux leur population stagner. Ainsi l'agglomération de Bastia (CAB) a vu sa population croître de 30.800 habitants en 1954 à 59.300 en 2017, celle d'Ajaccio de 31.100 à 87.300 sur la même période, mais en même temps Furiani a vu sa population passer de 200 à 5.600 habitants (x 28) et Alata de 300 à 3.200 (x10). Entre 1954 et 2017, Porto-Vecchio a quadruplé sa population, mais Bocognano a vu sa population diminuer de 40%, et Soccia de plus de 50% alors que Lumio a vu sa population plus que tripler sur la même période.

 

Au 1er janvier 2017, 334.938 habitants résident en Corse. Avec 35.700 personnes en plus depuis 2007, la population de l'île croît de 11,9 % sur dix ans, ce qui représente une croissance annuelle moyenne de 1,1 %, deux fois supérieure à celle de la France métropolitaine (sur la même période 4,6 % soit une évolution annuelle moyenne de 0,45 %). Ce sont les migrations qui expliquent cette augmentation de population. En effet, alors que la croissance française est tirée par le solde naturel (0,4 % par an), l'île enregistre autant de décès que de naissances entre 2007 et 2017. La périurbanisation et la stagnation démographique rurale se poursuivent actuellement puisque les deux principales agglomérations de l'île (Ajaccio/Bastia) ont une croissance démographique supérieure à la moyenne nationale mais en deçà de la moyenne régionale sur la période 2007-2017. Enfin les 143 communes rurales de moins de 250 habitants hors influence des aires urbaines perdent 400 résidents entre 2007 et 2017.

 

Cette baisse est totalement imputable au solde naturel. En effet, au cours des dix dernières années, ces territoires enregistrent plus de décès que de naissances. Le solde migratoire bien que positif ne compense pas ce déficit naturel.

 

Sur la période 1982-2017 la population a augmenté de 14 % dans la communauté d'agglomération de Bastia (CAB), de 47 % dans la communauté d'agglomération du Pays Ajaccien (CAPA), de 59% dans les communes littorales (hors deux communautés d'agglomération) et de 23% dans les communes de l'intérieur. La croissance du nombre de résidences principales est liée à celle de la population et au phénomène de desserrement des ménages dont la taille diminue, en moyenne. Ainsi, entre 1982 et 2017, le nombre de résidences principales s'est accru de 60 % dans la CAB, de 77 % dans la CAPA, de 90 % sur le littoral et de 63 % dans l'intérieur. Ces écarts sont amplifiés par rapport à l'évolution de la population du fait de la forte décroissance de la taille des ménages dans les communes littorales et dans les agglomérations, alors que cette taille était déjà faible dans l'intérieur et qu'elle a assez peu évolué depuis. Entre 2007 et 2017, les 19 intercommunalités corses enregistrent une augmentation de population, mais comme l'indique le tableau 23, cette croissance est très variable, de près de 30% à une quasi-stagnation.

 

 

Une densité humaine très variable géographiquement

 

La densité moyenne de la Corse est de 37,5 habitants/km², soit approximativement le tiers de la densité moyenne française, qui est de plus de 100 habitants/km², mais dépasse celle de départements montagneux comme l'Ariège (31 hbt/km²) ou les Hautes-Alpes (25 hbt/km²). Avec une moyenne de 900 habitants par commune, la Corse se singularise aussi par des communes de taille moitié moindre de la moyenne des communes françaises (1.800 habitants/commune). Mais ce qui caractérise encore plus l'île, c'est la très faible densité sur une large partie de son territoire : les communes de moins de 200 habitants ont une densité moyenne de 6 habitants au km². Si l'on regroupe les communes corses de population de moins de 360 habitants, on obtient une surface de plus de la moitié de la Corse, pour une densité de moins de 7 habitants au km² pour cet ensemble. Inversement, comme symbole du développement urbain des deux principales agglomérations, on notera que les 3 intercommunalités de la CAB de la CAPA et du Marana-Golo comptent en 2017 170.400 habitants soit 51% de la population, pour 5,7% de la surface du territoire, et une densité de 338 habitants/km².

 

Le tableau qui décrit par EPCI la densité, la croissance et le pourcentage de la population corse, résume les chapitres précédents.

Territoire Part de la population corse en 2017 en % Densité Croissance de la population de 2007 à 2017 en %
CC de Marana-Golo 7,11 143 28,37
CC de la Costa Verde 3,14 57 19,92
CC Celavu-Prunelli 2,60 23 19,91
CC de la Pieve de l’Ornano et du Taravo 3,72 19 16,31
CC Nebbiu - Conca d’Oro 2,19 19 15,03
CC du Sud Corse 6,32 36 13,73
CC de Fium’Orbu Castellu 3,87 20 13,62
CA du Pays Ajaccien 26,07 325 12,69
CC de la Castagniccia-Casinca 3,72 53 11,92
CC de l’Alta Rocca 2,52 12 11,49
CC du Sartenais Valinco Taravo 3,45 22 10,92
CC de l’Ile-Rousse - Balagne 3,11 27 10,31
CC de Calvi Balagne 3,61 22 8,64
CC du Cap Corse 2,03 22 7,99
CC du Centre Corse 2,92 27 7,63
CA de Bastia 17,70 870 6,38
CC de l’Oriente 1,81 13 4,84
CC Spelunca-Liamone 2,28 8 4,09
CC Pasquale Paoli 1,84 7 0,46
 Tableau 22 : Population corse par inter-communalité au 1er janvier 2017 (Source : INSEE, Recensement Principal de la population)

 

 

LA CONSOMMATION DE L'ESPACE ET L'IMPACT DE L'URBANISATION

 Un étalement urbain conséquent

Plusieurs outils peuvent être utilisés pour mesurer ce phénomène.

 

Selon une étude de l'Observatoire du développement durable parue en 2015, la surface urbanisée (i.e. la surface retirée de son état naturel, bâtie ou non) aurait été multipliée par trois en l'espace de trente ans en Corse entre 1970 et 2010.

 

La base Corine Land Cover qui permet de déterminer les surfaces artificialisées, par photo-interprétation des images aériennes, indique les valeurs suivantes 2 :

Année 2000 2006 2012 2018
surface artificialisée en Corse (ha) 16.426 16.758 18.472 22.712
Part de la surface artificialisée 1,9 % 2,0 % 2,1 % 2,6 %
 Tableau 23 : Artificialisation des sols selon Corine Land Cover (Copernicus)
 

 

 

 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
D'autres travaux effectués dans le cadre de l'élaboration du PADDUC ont permis de construire, à partir des cartographies du bâti existant, une tache urbaine qui permet d'avoir une représentation relativement fidèle de l'artificialisation des sols et avec une maille de traitement plus fine que celle issue de la méthode Corine Land Cover. Cette modélisation a été fait l'objet d'une analyse entre deux années espacées de presque 40 ans, alors que les données de Corine Land Cover sont directement exploitables entre deux millésimes (6 ans). La tache urbaine pour l'année 1980 représentait 7.336 ha, celle de 2019 19.610 ha. Elle a donc été multipliée par 2,7 en 40 ans, quand la population régionale n'a augmenté que d'un facteur 1,4 sur la même période.
 
Enfin, selon les données de l'observatoire national de l'artificialisation des sols géré par le CEREMA (analyse des fichiers fonciers), plus de 2 400 hectares ont été artificialisés en Corse entre 2009 et 2018, dont 78 % à des fins d'habitat. Les surfaces artificialisées augmentent donc régulièrement mais restent très faibles sur l'ensemble de la Corse (méthode CEREMA-Nord Pas de Calais). En France Métropolitaine, de 2009 à 2018, elles correspondaient à 2.557 km², soit 0,4% de la surface métropolitaine, en Corse cette surface artificialisée était de 24,1 km², soit 0,27% de la surface corse sur la même période.
 
Quelles que soient les méthodes de mesure et les références, la conclusion reste identique : l'artificialisation des sols augmente de façon plus importante que la population, l'étalement urbain est conséquent. La définition officielle de l'étalement urbain correspond en effet à une croissance de la surface urbanisée plus rapide que celle de la population.
 

Mais non homogène

Pour l'ensemble de la région (à l'exception du secteur de Corte), la période comprise entre 1975 et 1989 connaît les taux de croissance de la tache urbaine les plus importants. L'analyse spatiale réalisée en 2015 par l'Observatoire du développement durable a montré que l'utilisation des parcelles et la création de surfaces artificialisées ont suivi des tendances comparables sur les deux départements, avec un pic dans la période 1980-1984, un creux dans la période 1995-1999 (le rythme de croissance de la tache urbaine a diminué en se rapprochant de celui de la population.) et une remontée dans les années récentes. Plus localement, on constate des disparités :

En matière d'évolution de surface urbanisée, le secteur de Porto-Vecchio occupe la première place fin 2009, devant celui d'Ajaccio qui compte pourtant un nombre beaucoup plus important de parcelles utilisées laissant supposer une plus grande densification.

Les communes moyennes situées dans la couronne des grandes aires urbaines (Alata, Borgo) ou les communes principales des aires urbaines secondaires (Porto-Vecchio, Calvi) présentent une augmentation plus rapide des parcelles utilisées en nombre et en surface de 1970 à 2009.

Ainsi, près du quart des parcelles utilisées en Corse entre 1970 et la fin de l'année 2009 ont été consommées par neuf communes (Porto-Vecchio, Ajaccio, Borgo, Zonza, Biguglia, Furiani, Bonifacio, Lucciana et Alata) qui représentaient 35 % de la population de l'île en 2010. 

Selon les données de l'observatoire national de l'artificialisation des sols (CEREMA, fichiers fonciers), les dix communes corses dans lesquelles l'artificialisation a été la plus marquée en valeur brute entre 2009 et 2018 sont les suivantes, par ordre décroissant : Porto-Vecchio (300 hectares artificialisés), Bonifacio (147 ha), Zonza (126 ha), Figari (72 ha), Ajaccio (65 ha), Lecci (59 ha), Sarrola- Carcopino (57 ha), Prunelli-di-Fiumorbo (56 ha), Borgo (45 ha) et Bastia (44 ha). Ce sont soit des communes au développement essentiellement lié au tourisme, soit des communes des agglomérations d'Ajaccio ou de Bastia.

 

Une littoralisation de l'urbanisation

Évoluant en parallèle à la répartition humaine sur le territoire, l'urbanisation se concentre actuellement à proximité du littoral, contrairement aux modes traditionnels de l'occupation du territoire en Corse, en altitude moyenne et à l'intérieur de l'île. Cette urbanisation du littoral résulte de la conjonction de quatre phénomènes :

 

  • la désertification de l'intérieur, correspondant à l'exode rural en Corse, au profit du littoral et de la France continentale tout au long du XXe siècle et notamment après la Première Guerre mondiale,
  • les flux migratoires exogènes quasi-exclusivement dirigés vers le littoral : sur les 75.000 habitants qu'a gagné la région Corse entre 1999 et 2017, 80% ont été accueillis sur le littoral,
  • l'attractivité touristique de l'île très fortement liée au littoral, qui concentre la quasi-totalité des équipements touristiques marchands et une forte capacité d'accueil,
  • la présence historique moderne des principales villes sur le littoral, en lien avec le développement portuaire puis aéroportuaire, l'implantation des centres politiques et des services administratifs et le développement du tissu économique (emploi) et des services à proximité de celles-ci. 

 

 

Evolution de l'urbanisation sur la commune de Borgo de 2016 à 2019 (OEC, J. Salvini)

 

A noter en particulier l'importance du nombre de résidences secondaires en Corse, et leur fort développement récent, en particulier près du littoral : en 2017, la Corse compte 72.000 résidences secondaires soit 28,8 % de l'ensemble des logements. La Corse est donc la région française où la part de résidences secondaires est la plus importante, loin devant la région PACA (14,5 %) et la moyenne de France de Province (9,7 %). Ainsi la Corse, région touristique, représente 2,5 % de l'ensemble des résidences secondaires de France de province pour moins de 0,5% de la population nationale. Un tiers de ces résidences secondaires, pour la plupart construites dans la période récente, sont à moins de 500 m du littoral. Dans les deux intercommunalités les plus touristiques, Sud Corse et Calvi Balagne, le taux de résidences secondaires atteint 41,4 % et représente une résidence secondaire corse sur cinq. Ce taux atteint les 47 % dans la zone littorale de moins de 500 mètres.

 

 

Les surfaces impactées

EPCI Artificialisation 2009-2018 Surface EPCI % Surface artificialisée 2009-2018
CA de Bastia 76,59 6.928 1,11
CA du Pays Ajaccien 269,55 27.165 0,99
CC Celavu-Prunelli 86,53 38.283 0,23
CC de Calvi Balagne 85,98 56.614 0,15
CC de Fium’Orbu Castellu 172,56 64.956 0,27
CC de l’Alta Rocca 179,58 68.445 0,26
CC de l’Ile-Rousse - Balagne 102,76 39.123 0,26
CC de l’Oriente 74,77 47.465 0,16
CC de la Castagniccia-Casinca 84,09 23.445 0,36
CC de la Costa Verde 84,02 18.543 0,45
CC de la Pieve de l’Ornano 108,42 65.807 0,16
CC de Marana-Golo 112,57 18.238 0,62
CC du Cap Corse 37,78 30.861 0,12
CC du Centre Corse 14,72 36.167 0,04
CC du Sartenais Valinco Taravo 118,45 52.882 0,22
CC du Sud Corse 644,05 58.842 1,09
CC Nebbiu - Conca d’Oro 55,96 38.912 0,14
CC Pasquale Paoli 26,07 90.975 0,03
CC Spelunca-Liamone 80,36 92.326 0,09
 Tableau 24 : Artificialisation des sols en Corse par EPCI, 2009-2018, en hectares - source : Mesure de l'artificialisation à l'aide des Fichiers fonciers (CEREMA Nord Picardie)

 

Le développement urbain se fait sur différentes natures de sols, les espaces dits artificialisés sont soustraits à l'activité agricole et au milieu naturel, qu'ils amputent et morcellent, altérant la biodiversité. Les terres agricoles sont celles majoritairement consommées sur ces 40 dernières années. Ce n'est pas une surprise au vu de leurs caractéristiques (faible pente, accessibilité aux réseaux, irrigabilité, etc.) qui en font aussi dans de nombreux cas des terres constructibles en bordure de l'urbanisation existante. Or, les terres agricoles (cultures permanentes, terres arables, surfaces en herbe et divers) ne représentent, en Corse, que 22 % de l'espace 3, ce chiffre, sans doute sous-estimé en raison de la pratique d'un élevage extensif dans les espaces classés comme naturels, reste loin cependant des 45 % de terres consacrées à l'agriculture en France 4.

Une méthode de mesure de l'artificialisation des sols réalisée à partir des fichiers foncier 5 permet de mesurer cette artificialisation, par commune. En Corse, de 2009 à 2018, cette artificialisation aurait représenté une surface de 24.150.000 m², soit 2.415 hectares ou encore 0,27% de la surface de l'île. Cette surface artificialisée sur cette période est très variable géographiquement comme le montre le tableau ci-contre :

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Ainsi dans la CAPA et la CAB, ou dans la CC du Sud Corse, l'artificialisation atteint 1% de la surface totale en 9 ans, contre moins de 0,1% dans les CC du Centre Corse, Pasquale Paoli ou Spelunca-Liamone.

 

Si l'on étudie l'artificialisation au niveau communal avec la même méthode sur la période 2009-2018, on observe les résultats suivants : 

  • 7 communes ont connu plus de 2% d'artificialisation :

  • 15 communes ont connu une artificialisation entre 1% et 2% : Corbara Porto-Vecchio Penta-di-Casinca - Prunelli-di-Fiumorbo Lucciana Santa- Maria-Poggio Eccica-Suarella Poggio-Mezzana Cervione Castellare-di-Casinca Alata Aregno Bonifacio Oletta Monticello - Ajaccio (0,79%), 
  • 85 communes corses n'ont pas vu leur artificialisation augmenter.
Commune artificialisation 2009-2018
L’Île-Rousse 5,78
Afa 2,85
Santa-Lucia-di-Moriani 2,78
Bastelicaccia 2,25
Bastia 2,19
Lecci 2,14
Sarrola-Carcopino 2,12
 Tableau 26 : Communes avec plus de 2% d'artificialisation entre 2009 et 2018
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 

 

 

 

 

 

 

 

LES DISPOSITIFS D'OBSERVATION ET DE SUIVI

 

En Corse ou à l'échelle nationale, les politiques d'amélioration du développement urbain, de meilleure maîtrise du foncier et de l'immobilier par les collectivités, les propriétaires et les acteurs économiques, et de développement du logement accessible par tous ont amené depuis une douzaine d'années à la création et la montée en puissance de leviers d'action et de dispositifs d'observation dans ces domaines du foncier et de l'immobilier, notamment pour le logement. L'amélioration et la mutualisation des connaissances, la mobilisation des acteurs et des outils ont pour objectif premier de mieux maîtriser le développement foncier et immobilier.

 

Les outils développés en Corse

 

L'absence de titres de propriétés est une des causes principales de désordre juridique du patrimoine foncier et immobilier corse. Devant ce phénomène massif, avec des situations complexes et de longs délais de reconstitution des titres, un organisme dédié a été créé : le Groupement d'Intérêt public pour la Reconstitution des Titres de propriété en Corse (GIRTEC). En une décennie (2007-2017), le GIRTEC a reconstitué plus de 8.500 titres. Au regard de l'importance des travaux restant à réaliser, l'existence du GIRTEC a été prolongée. 

Un développement solidaire et maîtrisé du territoire implique une convergence des efforts, au-delà de l'action de titrement du GIRTEC, afin de mobiliser du foncier pour les collectivités locales. La loi ALUR, a permis la création de l'Office foncier de la Corse à qui il revient de mettre en œuvre des stratégies foncières, de contribuer à lutter contre l'étalement urbain, de constituer des réserves foncières en vue de réaliser notamment du logement. 

En croisant de multiples bases de données, un rapport adopté en 2019 par l'Assemblée de Corse a fourni pour la première fois des données objectives permettant de quantifier et de localiser le sentiment de pression foncière et immobilière : entre 2010 et 2017, 17 communes constituent 80 % des transactions d'appartement, tandis que 48 communes constituent 80 % des transactions de maison. De plus, l'augmentation des coûts du logement induite par la proximité du littoral rend l'accessibilité à la propriété des jeunes ménages plus difficile. 

Les outils nationaux

 
Outre les bases de données classiques sur le logement (FILOCOM/FIDELI), le logement social (RPLS,etc.), les prix des biens fonciers et immobiliers (DVF, Perval, EPTB, ECLN), la construction (Sitadel, base de donnée relative aux permis de construire), différents outils ont été développés récemment :
 

L'observatoire national de l'artificialisation des sols

 Le gouvernement s'est engagé, pour atteindre l'objectif de zéro artificialisation nette inscrit dans le Plan Biodiversité de 2018, à fournir des chiffres annuels sur l'artificialisation des sols, à une échelle fine et selon une méthodologie homogène sur le territoire national. Pour ce faire, le ministère de la Transition écologique a élaboré un observatoire de l'artificialisation des sols. Cet observatoire fournit des indicateurs sur l'artificialisation des sols à l'échelle communale. Ses données sont issues des Fichiers fonciers, base de données retraitée par le Cerema à partir des données MAJIC (Mise à jour de l'information cadastrale) de la Direction Générale des Finances Publique.

 

L'application Cartofriches pour aider à l'inventaire des friches

 

Présentée en Conseil de défense écologique le 27 juillet 2020, l'application Cartofriches s'inscrit dans l'objectif de zéro artificialisation nette, Afin de limiter l'étalement urbain, une solution est de développer des projets sur d'anciens sites industriels, ou d'autres espaces désaffectés. L'outil Cartofriches, développé par le Cerema pour le Ministère de la transition écologique, permet de visualiser sur une carte ces sites en friche à l'échelle nationale, et constitue un outil pour la prise de décision. Elle a vocation à être alimentée par des données nationales permettant un pré- recensement de sites potentiellement en friche, mais aussi et surtout par la connaissance locale (inventaires et observatoires locaux, études...).

 

L'objectif Zéro Artificialisation Nette (ZAN)

 

Malgré les dispositions législatives et réglementaires prises depuis 20 ans (loi SRU en 2000, loi Grenelle 2 en 2010, loi ALUR en 2014), la tendance à l'artificialisation des sols ne s'est pas infléchie en France, où, selon le CEREMA, plus de 25.000 hectares d'espaces naturels, agricoles et forestiers sont consommés chaque année. Dans ce contexte, le gouvernement a affirmé, dans son Plan Biodiversité présenté le 4 juillet 2018, un objectif de « Zéro artificialisation nette ». Cet objectif suppose que toute opération entraînant une artificialisation devrait être compensée par une action de « désartificialisation » (friche, zone d'activité vacante, parking...). Si la feuille de route de la Commission européenne pour une Europe efficace dans l'utilisation des ressources (2011) fixe un objectif de «suppression d'ici à 2050 de toute augmentation nette de la surface de terre occupée », le calendrier de mise en œuvre opérationnelle de l'objectif Zéro Artificialisation Nette en France n'est pas, en 2020, pas encore défini. 

Toutefois, dans son instruction aux préfets du 29 juillet 2019, relative à l'engagement de l'État en faveur d'une gestion économe de l'espace, le gouvernement confirme sa volonté « de rendre applicable l'objectif Zéro Artificialisation Nette du territoire », précisant que « ceci suppose dans un premier temps d'infléchir la consommation, puis de la stopper par un usage sobre de l'espace et par des actions de type compensatoire ».

  

 

  (DREAL, J. Dornbusch)

 

 

 

LE CADRE RÉGLEMENTAIRE

En Corse, l'incidence des effets négatifs de l'étalement urbain est accrue en raison d'un mode d'urbanisation peu coordonné par les collectivités locales, conséquence d'une longue absence de politique foncière et urbanistique, de l'absence de planification intercommunale et du manque de véritables objectifs d'aménagement. 

La plupart des logements collectifs ont été édifiés sans tenir compte de leur desserte. La voirie, établie a posteriori, se fraie un passage entre les immeubles, quand cela est possible. La mise en place de transports en commun est devenue un véritable casse-tête avec, au bout du compte, un niveau de service trop faible pour constituer une alternative à la voiture particulière. Les maisons individuelles partent à l'assaut des montagnes et du littoral dans un dédale de voies d'accès, compliquant la mise en œuvre de tous les services et aggravant fortement la facture énergétique. Les nouvelles constructions suivent, dans l'ensemble, les tendances de l'architecture contemporaines, sans spécificité ni recherche de continuité avec l'existant, menant à des ensembles incohérents. 

D'autres difficultés sont inhérentes à la Corse. L'une tient à la géographie très accidentée et très fragmentée de l'île et à la vigueur des particularismes qui mettent en exergue la nécessité d'une action publique coordonnée. L'autre tient au découpage communal. Dans la plaine orientale, les territoires communaux prennent la forme de lanières qui s'étendent depuis la montagne perpendiculairement au rivage. La zone urbanisée se développe de façon extensive, le long de la route côtière. Elle prend toutes ces communes en enfilade, de façon indistincte, au mépris de tous les principes de la planification urbaine. 

Cette diversité territoriale, avec un nombre élevé de communes et des territoires contraints souvent enclavés, n'a pas facilité la coopération entre communes ou bassins de population, d'où l'absence de stratégies territoriales à l'échelle des micro-régions pour établir des projets d'aménagement cohérent. 

L'aménagement en Corse est donc un sujet majeur compte tenu de la pression foncière importante, en particulier dans les communes du littoral et des contraintes fortes (topographie, patrimoine naturel, risques, servitudes) sur l'ensemble du territoire insulaire, qui nécessite d'être encadré. Le PADDUC vise à répondre, en partie, à ces problématiques. 

En raison des multiples difficultés que connaît la Corse en matière foncière, immobilière, de développement urbain et notamment de logement et de développement économique, liées à la topographie simultanément littorale et montagnarde de l'île, à par la superposition des textes législatifs et réglementaires à appliquer localement (code de l'urbanisme, loi littorale, montagne, dispositions agricoles, règles environnementales, etc..) ou aux incertitudes sur leur compatibilité (PADDUC/documents locaux d'urbanisme) ainsi qu'à la faiblesse des moyens juridiques et ingénierie de nombreuses petites communes, le Président de la République et plusieurs élus se sont rencontrés à Cozzano en avril 2019, comme mentionné précédemment. Outre un appui de l'État aux petites communes en matière d'urbanisme et d'aménagement, notamment pour les PLU, il est aussi envisagé des ateliers des territoires thématiques à la carte pour ces mêmes communes, en complément de l'appui réalisé par l'AUE Corse. 

Les grandes orientations et lois relatives à l'urbanisme et au logement

Les politiques publiques en matière d'urbanisme tendent à privilégier une certaine densité en matière d'habitat (habitat collectif, semi-collectif, habitat individuel groupé) et la mixité sociale et fonctionnelle. Néanmoins, le modèle de la maison individuelle constitue encore un type d'habitation recherché par une large majorité des ménages, conformément au processus d'individualisation qui a marqué la société à partir des années soixante. 

Ainsi, les préceptes du développement durable devront être adaptés à une géographie et une culture spécifiques. C'est la qualité du projet qui pourra emporter l'adhésion de ceux qui vont y vivre et seront les véritables acteurs de sa durabilité. 

Les cinq principales orientations de l'État en matière d'aménagement -la prise en compte des risques naturels et technologiques étant bien évidemment un préalable- sont les suivantes : 

  • assurer la prise en compte et la conciliation des objectifs de production de logements (y compris sociaux) et de préservation des ressources naturelles dans les documents de planification et d'urbanisme (objectifs Grenelle et ALUR) ;

  • promouvoir des documents d'urbanisme volontaristes à des échelles plus larges : schéma de cohérence territoriale (SCoT) sur les bassins de vie et plans locaux d'urbanisme (PLU) intercommunaux ; mettre en œuvre l'urbanisme de projet et promouvoir les formes urbaines denses et de qualité, économes de l'espace et des ressources;
  • impulser l'émergence de nouveaux projets intégrant les enjeux de l'aménagement durable de type ÉcoQuartiers qui veillent à favoriser la mixité sociale, la diversité des fonctions urbaines, la qualité du cadre de vie des habitants et la préservation de l'environnement.
  • assurer la prise en compte et la conciliation des objectifs de production de logements (y compris sociaux) et de préservation des ressources naturelles dans les documents de planification et d'urbanisme (objectifs Grenelle et ALUR) ; 
Les principales lois sur le logement et l'aménagement depuis le début du 21e siècle : 
  • 13 décembre 2000, Promulgation de la loi n° 2000-1208 relative à la solidarité et au renouvellement urbains («Loi SRU») dont les maîtres mots sont mixité urbaine et offre d'habitat diversifiée.
  • 5 mars 2007, Promulgation de la loi n° 2007-290 instituant le droit au logement opposable («Loi Dalo») et portant diverses mesures en faveur de la cohésion sociale.
  • 18 janvier 2013, Promulgation de la loi n° 2013-61 relative à la mobilisation du foncier public en faveur du logement et au renforcement des obligations de production de logement social, publiée au Journal officiel le 19 janvier 2013. 166
  • 24 mars 2014, Promulgation de la loi pour l'accès au logement et un urbanisme rénové - loi ALUR
  • 27 janvier 2017, Promulgation de la loi relative à l'égalité et à la citoyenneté (JO du 28).
  • 23 novembre 2018, Promulgation de la loi portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique (loi ELAN).

La loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique (loi ELAN) a quant à elle introduit la possibilité de créer des orientations d'aménagement et de programmation (OAP) visant à favoriser la densification dans les PLU (article L151-7 du code de l'urbanisme).

En outre : 

  • La loi n° 2009-967 du 3 août 2009 dite « Grenelle 1 » dans son article 7 a inscrit, parmi les objectifs du droit de l'urbanisme, la lutte contre la régression des surfaces agricoles et naturelles et la lutte contre l'étalement et la déperdition d'énergie avec une gestion économe des ressources et de l'espace. 
  • La loi n° 2010-788 du 10 juillet 2010 dite « Grenelle 2 », dans ses articles 17 et 19, impose aux documents d'urbanisme (schémas de cohérence territoriale et plans locaux d'urbanisme) de présenter une analyse de la consommation d'espaces naturels, agricoles et forestiers pendant les dix dernières années et de justifier des objectifs chiffrés de limitation de cette consommation. 
  • La loi n° 2014-366 du 4 mars 2014, dite loi « ALUR » et la loi n° 2014-1170 du 13 octobre 2014 d'avenir pour l'agriculture, l'alimentation et la forêt (LAAF) sont venues renforcer les dispositions relatives à la lutte contre l'étalement urbain et favorables à la préservation des espaces naturels et agricoles dans les SCoT et PLU. Cela se traduit notamment par le fait que les les PLU doivent analyser la consommation d'espaces naturels, agricoles et forestier au cours des dix dernières années, la capacité de densification et de mutation des espaces bâtis, exposer les dispositions qui favorisent, d'une part, la densification des espaces bâtis et d'autre part, la limitation de la consommation des espaces non bâtis. En outre, les PLU doivent fixer des objectifs chiffrés de modération de la consommation d'espaces et de lutte contre l'étalement urbain (articles L151-4 et L151-5 du code de l'urbanisme). Des obligations analogues sont assignées aux SCOT (article L141-3 du code de l'urbanisme).

 

Au vu du constat que l'on peut faire sur l'urbanisation des trente dernières années, la prise en compte de ces objectifs, dans leur ensemble, constituerait une inflexion majeure dans les pratiques urbanistiques de la Corse. Les travaux engagés par les collectivités qui révisent leur document d'urbanisme visent à réaliser des efforts significatifs en termes de réduction de la consommation de l'espace.

Certaines communes ont réduit d'environ 25 % voire 40 % leur consommation. 

Le PADDUC

 

Fruit d'un long travail de concertation entre tous les acteurs du territoire, le PADDUC est un projet de société à l'horizon 2040. C'est un document d'urbanisme qui dit le droit des sols en précisant par exemple, compte tenu des spécificités géographiques de l'île, les modalités d'application de la loi « Montagne » et de la loi « Littoral ». Une carte, établie au 1 : 100.000, fixe la destination générale des différentes parties du territoire. Des orientations réglementaires, contenues dans le livret IV, détaillent les prescriptions relatives à chacun des zonages définis par cette carte. Ces zonages permettent d'établir un respect des équilibres fonctionnels entre usages des sols, qui distinguent des espaces à vocation principalement urbaine et économique (tache urbaine actuelle hors bâti isolé et secteurs d'enjeux régionaux), espaces à vocation agricole (espaces stratégiques agricoles et espaces-ressources pour le pastoralisme et l'arboriculture traditionnelle), espaces à vocation naturelle (et/ou agricole) (espaces naturels faisant l'objet d'une protection forte, espaces stratégiques environnementaux, espaces naturels, sylvicoles ou pastoraux, espaces remarquables ou caractéristiques au sens de la loi « Littoral »). 

Ainsi, ce plan apparaît comme un document protecteur des espaces naturels et agricoles, notamment en fixant un objectif chiffré de préservation d'espaces stratégiques agricoles sur l'ensemble du territoire corse (au moins 105 000 hectares sur un total de 868 000). 

En 2018, le tribunal administratif de Bastia a prononcé une annulation de la carte des Espaces Stratégiques Agricoles (ESA), annulation confirmée par la Cour Administrative d'Appel de Marseille. Une nouvelle cartographie des ESA a été soumise à enquête publique en 2019. Elle doit être approuvée par l'Assemblée de Corse en 2020. 

Le PADDUC sert aujourd'hui de cadre de référence. Depuis le 24 novembre 2018, toutes les communes doivent avoir mis leur document d'urbanisme en compatibilité avec le plan. Il fournit, sous réserve des recours engagés, un environnement réglementaire relativement stabilisé pour des documents d'urbanisme confrontés par contre à une contestation fréquente devant le juge administratif, ainsi que des précisions dans l'application du Règlement National d'Urbanisme (RNU). 

Les documents locaux de planification

 

 Figure 38 : État d’avancement des documents d’urbanisme
(DDTm)

Mi-2020, dans 220 communes corses (sur 360) c'est le RNU (règlement national d'urbanisme) qui s'applique puisque moins de 40 % des communes disposaient d'un document de planification opposable (soit 140 communes sur 360), dont 56 PLU et 84 cartes communales. Il s'agit principalement des communes littorales et des communes urbaines ; les documents d'urbanisme couvrent ainsi environ 60 % de la population.

Par ailleurs, pour les communes ne disposant pas d'un document d'urbanisme : 55 d'entre elles se sont lancées dans l'élaboration d'un PLU ; 58 autres ont choisi de réaliser une carte communale Au vu des procédures en cours, 253 communes sur 360 devraient disposer, à terme, d'un document de planification en Corse (soit 70% des communes). 

Enfin, il convient de noter l'annulation (partielle ou totale) de plusieurs documents d'urbanisme (exemples : les PLU annulés en totalité de Propriano (2019), Porto-Vecchio (2014), le PLU partiellement annulé de Sisco (2019). 

 

L'élaboration d'un PLU qui doit être en compatibilité avec le PADDUC et l'ensemble du code de l'urbanisme ou la réglementation environnementale est souvent d'une grande complexité technique et administrative pour les petites communes, qui, confrontées aux pressions locales, peut amener leurs élus à choisir délibérément de ne pas finaliser leurs PLU, pour laisser l'État prendre les grandes décisions d'urbanisme. Ainsi, la complexité administrative et réglementaire amène à la pénurie de terrains constructibles, ce qui peut alimenter la hausse des prix du foncier, alors que théoriquement les documents d'urbanisme visent à combattre la spéculation. 

 

A noter que des assises de l'urbanisme, associant des représentants des maires, la Collectivité de Corse et l'État, se sont tenues en Corse en 2019 afin d'étudier les actions à engager pour répondre aux difficultés exprimées par les maires en matière d'urbanisme, liées à la complexité de l'empilement réglementaire : réglementation environnementale, littorale, liée à la montagne ou à l'agriculture. 

 

Dans le cadre de ces assises a notamment été validée la mise en place d'une assistance à maîtrise d'ouvrage, financée par l'État, destinée à accompagner 20 communes de Corse dans l'élaboration ou la révision de leur PLU.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

LA CONSTRUCTION ET LE PARC IMMOBILIER

Le parc immobilier : les logements (dont le logement social)

En 2017, on comptait en Corse 238.382 logements (source Filocom) dont : 137.720 résidences principales, 72.429 résidences secondaires (30,4%) et 28.233 logements vacants (11,8%). La très forte proportion de résidences secondaires est la caractéristique principale du parc de logements de la Corse. Sur les 137.720 résidences principales on compte 76.100 propriétaires occupants (55,3%), 41.523 logements loués à titre privé (30,1%), 13.405 logements sociaux loués par grands bailleurs nationaux ou par une grande collectivité territoriale corse (pour un total de 14.115 logements sociaux de ces bailleurs), et 1.575 logements loués par les collectivités (1,1%) 6.

En revanche, la grande majorité des communes rurales dépasse les 60% de propriétaires occupants. Dans quatre petites communes rurales, ce taux dépasse 90% : Erone, Parata, Piano, Azzana. Les deux tiers des propriétaires résident en maison alors que les trois quarts des locataires occupent un appartement. Le taux de propriétaires occupants varie fortement entre les espaces urbanisés et les communes rurales. Les principales communes affichent un taux de propriétaires bien en deçà du taux moyen Corse.

 

Commune Taux de propriétaires occupants
en %
Corte 33
Bastia 37
Calvi 40
Île Rousse 40
Propriano 42
Ajaccio 47
Porto-Vecchio 48
Sartène 53
Bonifacio 55
Ensemble Corse 55
Tableau 26 : Part des propriétaires occupants par commune (INSEE-RP)

Les logements individuels (92.235, 38,7%) sont moins nombreux que les logements collectifs (146.147, 61,3%).

Pour ce qui est des résidences principales, les proportions sont de : 62% en collectif et 38% en individuel.

Le taux de bâti ancien -avant 1915- dépasse les 80% dans de nombreux villages de l'intérieur, mais est inférieur à 10% dans de nombreuses commune au développement récent : Furiani, Biguglia, Calvi, Porto-Vecchio, etc. A Lecci, 3% des logements ont été construits avant 1915. A Ajaccio, 9% et à Bastia, 21,4%.

Simultanément, dans certaines communes au développement récent, le taux de logements construits après 2000 dépasse 40% : Sarrola-Carcopino (53%), Lucciana (51%), Biguglia (48%), Furiani (41%), alors que 8 communes n'ont aucun logement construit après cette date.

 

Le taux de logements vacants et très élevé dans certaines communes rurales : 34,7% à Quenza, 40% à Piazzali, et 47% à Alzi, plus de 20% dans plus de 70 de ces communes rurales. Inversement il est très faible soit dans des communes très attractives pour le tourisme, soit en plein développement : 2,8% à Lumio, 4,4% à Biguglia, 5% à Furiani. Dans les deux principales villes corses il est proche de la moyenne insulaire : à Ajaccio il est de 11,2% et à Bastia de 10,41%.

 

En 2017, si la Corse compte 72.000 résidences secondaires soit 28,8 % de l'ensemble des logements, toutes ne sont pas des résidences « littorales » : il existe plusieurs types de résidences secondaires, en fonction de leur localisation et en particulier un patrimoine important de logements de construction ancienne et à l'intérieur des terres.

Ainsi certains résidents corses passent des week-ends et une grande partie de leurs vacances « au village », dans la maison patrimoniale familiale, alors que d'autres résidences secondaires sont utilisées par des propriétaires continentaux (France ou non) et de façon plus saisonnière. Si 37 % des résidences secondaires appartiennent à des résidents en Corse, plus d'une résidence secondaire sur deux -55%- appartient à un résident en France (hors Corse) et 7,9% à des résidents à l'étranger dont la moitié à des résidents en Italie.

Le paramètre identifiant de la façon la plus nette le parc de logements des communes de l'intérieur de la Corse est la part des logements anciens, 57 % d'entre eux ont été construits avant 1949 contre seulement 18 % dans les communes littorales et dans les communautés d'agglomération.

 

 

 

 

Logement social en Corse

En 2019, en Corse le parc social des bailleurs sociaux était constitué de 14.530 logements , dont 13.606 loués, ce qui représente approximativement 10% du parc de résidences principales, et 326 logements vacants proposés à la location. 90% des logements sociaux corses correspondent à du logement collectif. Ce parc est en croissance, puisque chaque année depuis 2014, par construction ou achat, 100 à 600 logements sociaux ont été inaugurés. Ce parc a un âge moyen de 33 ans, moins de 300 logements sociaux ayant plus de 60 ans. Le taux de vacances de ce parc oscille entre 1% et 2,5% ces 5 dernières années. Le taux de mobilité annuel varie lui entre 5 et 7%. On note un fort déficit en petits logements sociaux.

Les intercommunalités d'Ajaccio (CAPA) et de Bastia (CAB) regroupent 10.077 logements sociaux en 2019, soit 69,4% du parc, les deux seules communes d'Ajaccio (4.389) et Bastia (5.141) : 9.530 logements sociaux.

L'étude Logements sociaux en Corse - Territorialisation des besoins d'ici 2030, (DREAL/ INSEE/CEREMA Méditerranée) indique un nombre 'idéal' de 22.000 logements sociaux pour 2030 en Corse, ce qui correspond à un besoin annuel de 750 nouveaux logements sociaux en Corse. La même étude établit que 5.700 nouveaux logements sociaux correspondent aux besoins des agglomérations de Bastia ou Ajaccio. Ces nouveaux logements peuvent correspondre à de la construction neuve ou à de la réhabilitation du parc privé, par exemple par conventionnement avec l'ANAH.

 

La construction (locaux et logements) : regard sur 5 à 10 ans

 

Figure 39 : Nombre de logements autorisés et commencés en Corse - 2000-2019 - (MTE BD Sitadel)

 

Sur la période 2000-2019, l'évolution du nombre de logements autorisés annuellement a connu une hausse importante, puisqu'au début des années 2000 ce nombre est un peu au dessus de 2.500 alors qu'après 2010, il dépasse régulièrement 5.000 unités/an, pour en moyenne 4.360 logements autorisés entre 2000 et 2019. Si ce nombre d'autorisations a fluctué irrégulièrement, avec par exemple à peine plus de 3.000 autorisations en 2014, sur 20 ans il est en pleine croissance sur longue période.

En 2019, le nombre de logements mis en vente aux particuliers par des promoteurs (projets de plus de 5 logements, logements collectifs) fut de 948, soit bien plus faible qu'en 2018 (1620) et 2017 (1395), pour 1.604 ventes, ce qui a amené le stock de logements destinés à la vente à 1.159 fin 2019, son plus faible volume depuis plusieurs années. Fin 2019 le prix moyen au m² d'un logement collectif était de 3.472 euros. Pour l'individuel, pour le même type de projet, le nombre de mise en vente a été de 68 logements en 2019, pour un prix de vente moyen du lot de 418.000 euros.

Si l'on s'intéresse à la surface de locaux (constructions destinée à usage professionnel : commerces, industrie, bureaux, etc...), on constate que sur la même période (2000-2019) les autorisations passent de 100.000 m²/an après l'an 2000 à plus de 200.000 m²/an avant 2020, avec une moyenne de 172.000 m² autorisés annuellement, et une croissance irrégulière.

De nombreux facteurs influent ces autorisations, dont la conjoncture économique locale et nationale, mais aussi localement l'établissement ou non de documents d'urbanisme (PLU) et l'ensemble de la réglementation foncière environnementale et immobilière.

Tous logements confondus, la surface moyenne d'un logement neuf en 2019 est de 90 m² ; elle est de 114 m² pour un logement individuel et 68 m² pour un logement collectif.

 

Le patrimoine ancien : une richesse

La Corse conserve un patrimoine exceptionnel d'architecture rurale ancien. Ces réalisations, qui ont vu le jour dans des temps difficiles, participent d'une volonté collective aujourd'hui disparue et sans laquelle il sera difficile de satisfaire aux objectifs optimistes de l'aménagement durable. Elles sont menacées par l'exode rural, l'indivision et la méconnaissance de leur valeur. Les qualités thermiques du bâti ancien sont inégales, mais certains éléments techniques méritent d'être relevés : fenêtres avec contre-volets intérieurs et volets extérieurs, toitures doublées d'un platelage et isolées par des éléments végétaux. 

Voir le chapitre « Les paysages et le patrimoine »

 Devant la dégradation de ce patrimoine traditionnel dont l'exemplarité pourrait éclairer l'urbanisation future de la Corse, il est important de maintenir les mesures conservatoires et les actions éducatives déjà engagées par l'Office de l'environnement de la Corse (OEC) et les Conseils d'architecture d'urbanisme et d'environnement (CAUE), notamment en direction de tous les publics. À titre d'exemple, chaque année depuis 2006, le CAUE de la Haute-Corse, dans le cadre d'un programme pédagogique initié par l'OEC et en collaboration avec l'Éducation nationale, intervient auprès d'un public scolaire (une dizaine de classes primaire et collège) autour d'un projet sur le patrimoine de proximité. Le CAUE de la Corse-du-Sud a mis en place également depuis plusieurs années un cycle « Patrimoine et pédagogie », véritable parcours de découverte et de sensibilisation à l'architecture et à l'urbanisme proposé aux scolaires de la ville d'Ajaccio.

D'autres initiatives, comme les « Sentiers du patrimoine » réalisés par l'OEC (dix-sept à la fin de l'année 2020) constituent des itinéraires de découvertes basés sur la valorisation du patrimoine matériel et immatériel. Ils s'adressent à tous les publics et permettent la mise en commun des ressources locales, une meilleure accessibilité physique, culturelle et virtuelle du patrimoine et de recréer du sens et des liens entre les acteurs et les générations du territoire. Les techniques de construction en pierres sèches y occupent une grande place. Afin d'assurer la pérennité du dispositif, les sentiers du patrimoine font l'objet d'un suivi et d'une évaluation par des représentants de l'OEC. 

http://www.sentiers-patrimoine-corse.fr

La mise en place de formations « Calade et pierre sèche » par la Chambre régionale de métiers et de l'artisanat de Corse en Alta Rocca est également à noter. Le GRETA de Haute-Corse propose un certificat de qualification professionnelle « Ouvrier professionnel en pierre sèche ».

La DREAL a contribué à la promotion de la pierre sèche, notamment en 2017 et 2019, en organisant des formations à destination des prescripteurs (bureaux d'études, personnels techniques des collectivités, architectes...) afin de sensibiliser les professionnels sur l'intérêt de l'emploi de cette ressource dans les projets construction et d'aménagement.

 

 

LA TRANSITION ÉNERGÉTIQUE DANS LA CONSTRUCTION LE LOGEMENT ET L'AMÉNAGEMENT

Diviser par quatre les émissions françaises de gaz à effet de serre à l'horizon 2050 est un objectif ambitieux et volontariste engagé par la France, mêlant un ensemble de considérations sociétales, techniques, technologiques et économiques avec en toile de fond des enjeux majeurs pour les pouvoirs publics. En Corse, le secteur du bâtiment représente 42 % des émissions de gaz à effet de serre et 41 % de la consommation énergétique. L'objectif d'autonomie énergétique de la Corse à l'horizon 2050 fixé dans le SRCAE nécessite un travail important sur la réduction de la consommation énergétique des bâtiments. Afin de parvenir à cet objectif, il sera nécessaire d'atteindre une cadence de 3 000 rénovations énergétiques globales de logements par an dès 2020 et de la maintenir pendant trente ans. Les pouvoirs publics aussi bien locaux que nationaux font converger les moyens vers cet objectif à travers le projet ORELI (Outil pour la rénovation énergétique du logement individuel) de la CDC et le renforcement des moyens financiers de l'ANAH (Agence nationale pour l'amélioration de l'habitat). 

 

 

 Construction d'un ensemble de 191 logements à Ajaccio (DREAL, J. Dornbusch)

 

Une estimation du coût des travaux de rénovation énergétique du parc

Le secteur de l'entretien-rénovation de logements représentait, en 2014, 36 % de l'activité du bâtiment en Corse. Il se démarque par sa forte stabilité sur la période 2008-2014, où il a été très peu sensible aux variations économiques à la différence de la construction neuve. Les dispositifs d'aides obligent à avoir recours pour les travaux à des entreprises labellisées RGE (« reconnue garante de l'environnement ») dont le nombre en Corse reste faible : 151 en 2015, 172 en mai 2016, 268 au premier trimestre 2020. 

Néanmoins, les politiques publiques s'organisent avec pour but une montée en puissance permettant d'atteindre les objectifs du SRCAE (3 000 logements rénovés par an) et de la loi Transition énergétique pour la croissance verte. Ainsi, si l'éco-PTZ ne rencontre toujours pas le succès que l'on aurait pu imaginer en 2009 à la mise en place de ce dispositif, au point de ne générer aucun prêt en 2015, le crédit d'impôts «Développement durable», devenu crédit d'impôts « Transition énergétique » a connu un réel engouement en Corse. Lancée le 1er janvier 2020, « Ma primeRénov » remplace le crédit d'impôt pour la transition énergétique (CITE) et les aides de l'Agence nationale de l'Habitat (Anah) « Habiter mieux agilité ». Cette prime s'adressait au départ aux ménages les plus modestes selon les conditions de ressources fixées par l'Anah. 

Depuis le 1er octobre 2020, elle a été étendue à l'ensemble des propriétaires, quels que soient leurs revenus, qu'ils occupent leur logement ou qu'ils le mettent en location. 

En 2019, ce sont plus de 6.600 logements qui ont étés rénovés énergétiquement grâce au dispositif « Agir Plus » d'EDF et aux aides de l'Anah, dont 2.734 rénovations au bénéfice des publics les plus modestes. 

Les politiques publiques s'organisent pour que les objectifs du SRCAE et de la loi Transition énergétique pour la croissance verte puissent être atteints. Le Plan de rénovation énergétique de l'habitat en 2013 symbolisé par la mise en place des « Point rénovation info service » et le projet ORELI débutant en 2016 sont des applications concrètes de ces politiques. 

Le projet ORELI consiste à rénover 200 logements pilotes constituant l'ensemble du panel des logements individuels en Corse afin d'en tirer les enseignements nécessaires à la mise en place d'outils permettant d'atteindre les 3.000 rénovations par an en 2020. Ces rénovations, qui viseront un niveau BBC-rénovation, bénéficieront d'aides financières de la Région en sus des aides déjà existantes et surtout d'une ingénierie, d'un suivi des travaux et des consommations énergétiques post-travaux renforcées. 

 

Accompagnement et formation

La priorité actuelle en matière de formation sur la thématique de la transition énergétique en Corse concerne l'obtention du label RGE par un nombre suffisant d'entreprises. Les entreprises de bâtiment connaissent en effet de réelles difficultés à former leurs salariés en raison de leur faible taille et d'un turn-over important. Le nombre minimal exigé de participants aux formations trop élevé (de 8 à 10), ainsi que le regroupement des formations proposées dans des centres régionaux ne favorisent également pas la participation des entreprises aux actions de formation. 

 

Les éco-matériaux

La réduction de la consommation énergétique du parc de logements en Corse, suite aux renforcements des législations en matière énergétique dans le logement neuf (réglementation thermique) et aux politiques visant à promouvoir la rénovation énergétique, pose aussi la question de l'accessibilité aux éco-matériaux. En effet, l'énergie grise (énergie consommée pour produire, poser, déconstruire et recycler les matériaux d'une construction) constitue une part non négligeable de l'impact écologique des bâtiments ainsi l'usage de matériaux bio-sourcés permet de réduire considérablement cet impact. 

Cette rénovation écologique peut être coordonnée au niveau local dans le cadre de programmes concertés de type OPAH Énergie ou Agendas 21. Le potentiel de la filière bois locale a été remis très récemment au cœur de la problématique environnementale, et notamment en vertu de la loi Transition énergétique pour la croissance verte qui favorise l'emploi du bois comme matériau ou combustible. Des projets pilotés par l'État et la CDC visent à promouvoir l'utilisation de ces matériaux en Corse. 

On constate également, d'après plusieurs études micro-régionales menées par l'OEC et le BRGM, une disparition des carrières d'extraction des matériaux locaux et le recours de plus en plus fréquent à des matériaux importés. Cette situation a conduit le ministère de la Culture à envisager de nouvelles possibilités d'extraction prévoyant les prélèvements temporaires dans le cas de restauration de bâtiments anciens dont l'intérêt patrimonial ou architectural justifie que celle-ci soit effectuée avec leurs matériaux d'origine prélevé dans la carrière d'origine ou une carrière proposant un matériau analogue.  

 

LES DÉMARCHES NOVATRICES POUR L'AMÉNAGEMENT

 

Eco-quartiers, redynamisation centres-ville, dispositif cœur de ville...

De nouvelles démarches ont été avancées afin de redynamiser certains espaces urbains fragilisés par l'évolution des comportements. Bastia et Ajaccio font partie des 222 communes qui ont été sélectionnées en 2018 pour bénéficier du plan national «Action Cœur de Ville» qui dispose à l'échelle nationale d'un financement global de 5 milliards sur 5 ans. Ce programme s'inscrit dans une politique de renforcement de la cohésion des territoires, et cherche à améliorer rapidement l'attractivité des espaces situés dans les espaces centraux de ces « villes moyennes ».  

Les villes non concernées par « Action Cœur de ville » peuvent utiliser, depuis la loi ELAN, une Opération de Rénovation des Territoires (ORT). En 2019, Propriano a signé une convention ORT ayant pour objectif de revitaliser son centre-ville et de réhabiliter des habitats vétustes. 7   S'inscrivant dans cette volonté de gestion durable de la ville, la démarche Écoquartiers, concrétisée en 2012, a été initiée par plusieurs communes, généralement en Corse-du-Sud, à partir de 2017 8.   Argiusta-Moriccio et Vico-Sagone ont été les premières communes à engager une démarche de labellisation, suivies par Evisa. En 2020, Ajaccio a signé une charte avec l'État visant à réhabiliter le quartier du Finosello, au centre du tissu urbain.    

Redynamiser les territoires et promouvoir la ville durable

 

La mise en œuvre d'un aménagement durable des territoires, dans un objectif d'urbanisation maîtrisée, constitue un enjeu prioritaire pour préserver les ressources naturelles et les paysages et maintenir ou restaurer un cadre de vie qualitatif.

 

La démarche ÉcoQuartiers

 

Elle a été lancée en 2009 par le ministère en charge de l'aménagement des territoires afin de favoriser l'émergence d'une nouvelle façon de concevoir, de construire et de gérer la ville durablement. Cette démarche se fonde sur le respect de 20 engagements portant sur : 

  • la gouvernance partagée et la co-construction du projet avec les habitants ,
  • l'amélioration du cadre de vie ,
  • le développement économique local ,
  • la gestion responsable des ressources et l'adaptation au changement climatique.
 

La démarche ÉcoQuartier accompagne tous les types de projets d'aménagement : programmes neufs, renouvellement urbain, rénovations de quartiers anciens, opérations dans de grandes agglomérations ou dans des contextes périurbains et ruraux.

Les opérations s'inscrivant dans cette démarche bénéficient du label ÉcoQuartier. Celui-ci vient distinguer et valoriser les démarches de conception et de réalisation de projets d'aménagement qui respectent les principes du développement durable. Le processus de labellisation comporte quatre étapes, correspondant aux différents stades du projet : l'engagement dans la démarche ÉcoQuartier (signature d'une charte), la mise en chantier, la livraison du projet et la vie de quartier et son amélioration continue. Les services de l'État (DREAL, DDTM) et les partenaires locaux peuvent accompagner le projet à toutes les étapes de la labellisation.

Début 2020, on dénombrait 500 ÉcoQuartiers en France. En Corse, quatre communes sont, à cette date, engagées dans la démarche (Argiusta-Moriccio, Vico, Evisa et Ajaccio). Deux exemples d'écoquartiers réalisés en Corse :

 

1) L'écoquartier d'Argiusta-Moriccio

La commune d'Argiusta-Moriccio, environ 80 habitants, a établi une stratégie de développement économique et patrimonial qui se décompose en plusieurs projets, ayant pour certains fait l'objet d'études, en cours ou abouties : Il s'agit notamment : 

  • de rénover une bâtisse en entrée de village afin de créer entre 2 et 4 logements ;
  • de créer un sentier du patrimoine et de mettre en valeur les fontaines du village ;
  • de créer un espace de jardins solidaires et de prolonger une trame verte ;
  • d'étudier l'opportunité de créer un lotissement ;
  • d'aménager et de développer un point multiservices ;
  • d'aménager un espace de co-working dans le bâtiment de la mairie ;
  • de créer une maison du pastoralisme sur la place derrière la mairie ;
  • de rénover le monument Torréen et de le relier au sentier patrimonial ;
  • de mettre en place une navette allant jusqu'à Petreto-Bicchisano.
 

2) L'écoquartier de Sant'Appianu/Vico-Sagone

Le projet d'éco-quartier se focalise sur la partie littorale de la commune (Sagone) et les aménagements forment un espace discontinu. Un tronçon de voie partagée aura pour vocation d'apaiser les circulations. Le partage de la voirie entre les piétons, le vélo et la voiture favorisera les modes doux. Les bordures de chaussée seront végétalisées. La création d'une borne à vélos ainsi qu'un parking de délestage dans la zone du projet encourageront l'apaisement des circulations. En bordure de la rivière Sagone, un espace naturel de 6 hectares sera aménagé pour la promenade, les loisirs et le sport. Des parcours de santé et aussi de découverte de la flore et de la faune locales seront aménagés. La rivière sera utilisée pour les promenades en barques. Le site archéologique de Sant' Appianu, élément central de Sagone, sera doté d'un centre d'interprétation. Un dispositif de visite en 3D permettra d'illustrer le parcours de la visite parmi les ruines. Le parcours patrimonial se complétera d'un centre de services de proximité, d'une maison de santé. Une résidence de 25 logements à vocation locative et de profil R+2 (rez de chaussée et deux étages) sera construite à proximité. À plus long terme, le port de plaisance de Sagone sera repensé : création de 120 anneaux, création d'un quai et d'un service de navettes maritimes desservant la côte ouest et l'agglomération d'Ajaccio, aménagements pour la promenade et équipements éco-conçus pour la plaisance.

 

Opération de revitalisation de territoire (ORT)

 

Créée par la loi portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique (Elan) du 23 novembre 2018, l'opération de revitalisation de territoire (ORT) est un outil nouveau à disposition des collectivités locales pour porter et mettre en œuvre un projet de territoire dans les domaines urbain, économique et social, pour lutter prioritairement contre la dévitalisation des centres-villes. 

L'ORT s'adresse à tout territoire qui souhaite engager un projet de revitalisation. Elle vise une requalification d'ensemble d'un centre-ville dont elle facilite la rénovation du parc de logements, de locaux commerciaux et artisanaux, et plus globalement le tissu urbain, pour créer un cadre de vie attractif propice au développement à long terme du territoire. 

Plus de 200 ORT ont été signées au 1er janvier 2020 en France, dont six en Corse, à Ajaccio, Propriano, Sartène, Olmeto, Petreto-Bicchisano et Bastia. 

 

Notes :

Progression de la population en France métropolitaine entre 1982 et 2017 : +18 % et augmentation du parc de logements + 47 % (Source INSEE)

2 CORINE Land Cover (CLC) est un inventaire biophysique de l'occupation des sols et de son évolution selon une nomenclature en 44 postes. Cet inventaire est produit par interprétation visuelle d'images satellite. L'échelle de production est le 1/100 000. CLC permet de cartographier des unités homogènes d'occupation des sols d'une surface minimale de 25 ha. Cette base de données a été initiée en 1985. Les millésimes 1990, 2000, 2006, 2012 et 2018 ont été réalisés.

3 Source : Chiffres clés de l’agriculture corse, bilan de campagne 2018 édition 2019.
4 Source : Agreste, Statistiques agricole annuelle 2018-2019, données provisoire avril 2020 n°2
5 Source : Mesure de l’artificialisation à l’aide des Fichiers fonciers https://artificialisation.biodiversitetousvivants.fr/les-donnees-au-1erjanvier-2018#paragraph--970

6 85.000 résidences principales ont un statut d’occupation « autre » : occupant à titre gratuit...

7 https://www.gouvernement.fr/partage/11079-discours-dupremier-ministre-a-propriano
8 http://www.ecoquartiers.logement.gouv.fr/le-label/

 

 

 

 Tableau de synthèse : 

  • Caractéristiques principales
  •  Importance des espaces préservés et meilleure prise en compte des enjeux par les politiques.
  •   Entrée en vigueur de la loi Transition énergétique pour la croissance verte, du SRCAE et du Plan de rénovation énergétique de l’habitat (intégrant la mise en oeuvre du dispositif ORELI).
  •  Existence du GIRTEC et création de l’OFC.
  •   Importance d’un patrimoine ancien de qualité, mais gravement menacé par l’indivision, l’exode rural et la perte des repères architecturaux qui s’imposaient au moment de leur construction, la perte des savoir-faire et l’absence de matériaux locaux.
  •  Urbanisation rapide, consommatrice d’espace et non maîtrisée.
  •   Forte pression spéculative sur le littoral au détriment de l’agriculture, des espaces naturels et de la biodiversité.
  •  Implantation diffuse génératrice de surcoûts, sans cohérence avec le réseau routier et la desserte par les transports en commun.
  •   Architecture contemporaine, dans l’ensemble, sans spécificité ni recherche de continuité avec l’existant.
  •  Parc de logements marqué par une forte proportion de résidences secondaires.
  •   Importance du nombre de constructions neuves en regard de la population.
  •  Difficultés de formation des entreprises de bâtiment dues à leur faible taille et à un turn-over important, au regroupement de formations dans des centres et au nombre exigé de participants aux formations, trop élevé.
  •   Parc de logements construit à 50 % avant l’existence d’une réglementation thermique.
  •  Nombre réduit d’entreprises labellisées RGE.
  • Tendances évolutives
  •   Marché de la rénovation énergétique important pour les entreprises compte tenu de l’état du parc.
  •   Offre de formation conséquente et adaptée en augmentation depuis plusieurs années.
  •   Adaptation progressive des métiers aux exigences du « Grenelle ».
  •   Émergence de documents supra-communaux.

 

  Point positif   Point négatif

 

 

Pour aller plus loin :

Titre Organisme Année
La fiscalité sur les successions en Corse - Les "arrêtés Miot" ADEC / Corsica Statistica 2017
La fiscalité en Corse ADEC / Corsica Statistica 2017
Le parc locatif social en Corse – Bilan annuel ADEC / Corsica Statistica 2018
Construction d’un bâtiment tertiaire avec un niveau de performance Bâtiment basse consommation (BBC) Organisme : Kalliste Fiduciaire ADEME, AUE, EDF 2012
Installation d’eau chaude sanitaire solaire pour 43 logements d’une résidence sociale à Propriano Organisme : ADOMA ADEME, AUE, EDF 2012
Observatoire local des loyers sur la CAPA – résultats 2019 ADIL de Corse 2020
Résultats Observatoire des Loyers 2019 – Unité Urbaine de Bastia ADIL de Corse 2020
Etude comparative : loyers parc privé et parc social sur Ajaccio ADIL de Corse 2020
Rapport d’information sur les marches fonciers et immobiliers de Corse AUE 2019
Les marchés du logement en Corse - La Maille Habitat AUE, CGDD/SDES 2020
Rapport d’analyse des propositions formulées au sein du groupe de travail « Lutter contre la pression foncière et la spéculation immobilière » en Corse CGEDD, CGAAER 2016
Rapport de l’audit énergétique CUBE 2020 de la DIRECCTE d’Ajaccio CEREMA Méditerranée 2019
Rapport de l’audit énergétique CUBE 2020 de la DRFiP d’Ajaccio CEREMA Méditerranée 2019
Les copropriétés fragiles à Bastia : Étude de repérage dans les quartiers sud CEREMA Méditerranée pour la DDTM 2017
Valeur vénale des terres agricoles en Corse DRAAF/SRISE 2019
Les permis de construire en Corse : analyse sur longue période DREAL 2018
Logement social : la demande et les attributions en Corse Bilan annuel DREAL 2019
Le parc locatif social corse - Bilan annuel DREAL  
Logements sociaux en Corse : Territorialisation des besoins d’ici 2030 CEREMA Méditerranée pour la DREAL 2018
Portrait de Territoires : Les marchés immobiliers en Corse entre 2010 et 2014 Mars 2018 CEREMA Méditerranée pour la DREAL 2018
Les matériaux biosourcés dans la construction en Corse - État des lieux et perspectives de développement novembre 2016 DREAL Corse, OEC/CDC, DIRECCTE, Corse Compétences, 2016
Le BTP en Corse INSEE 2016
Les hameaux : de « nouveaux villages » ou quand le développement démographique se fait hors du chef-lieu INSEE 2017
Parcours résidentiels dans la CAPA : Ajaccio attire les nouveaux arrivants mais la périurbanisation gagne du terrain INSEE 2018
Des résidences principales et secondaires en forte croissance INSEE 2018
En Corse, la plus faible progression du taux de propriétaires en 30 ans INSEE 2018
Les trois quarts des Corses travaillent dans leur intercommunalité de résidence INSEE 2019
Résidences secondaires : un logement sur trois en Corse, avec des profils variés selon les intercommunalités INSEE 2020
En Corse, 86 % de la population vit dans l’aire d’attraction d’une ville INSEE 2020
Dynamique des marchés fonciers en milieu rural et périurbain Analyse des données SAFER 2009-2016 Zoom sur le Territoire de l’Extrême Sud Alta Rocca Observatoire Foncier Corse (Office foncier et SAFER) 2017
Dynamique des marchés fonciers en milieu rural et périurbain Exploitation des données SAFER 2009-2018 Zoom sur le Territoire du Pays Ajaccien Observatoire Foncier Corse (Office foncier et SAFER) 2019
Logement et populations en difficulté sociale en Corse l’analyse de l’offre et de la demande : adéquation entre parc social et demandeurs de logement social, livret 1 Plateforme Régionale d’Observation Sanitaire et Sociale, 2015
Logement et populations en difficulté sociale en Corse : profil des demandeurs de logement social a quels profils appartiennent les demandeurs accédant au parc public ?, livret 2 Plateforme Régionale d’Observation Sanitaire et Sociale, 2015
Logement et populations en difficulté sociale en Corse : le public des centres d’hébergement et de réinsertion sociale et centres maternels, de l’hébergement au logement, livret 3 Plateforme Régionale d’Observation Sanitaire et Sociale, 2015
Les matériaux biosourcés dans la construction en Corse : état des lieux et perspectives de développement DREAL, OEC, DIRECCTE 2016

 

 
Cet article provient du site de Observatoire du Développement Durable de Corse
http://www.oddc.fr