Une nouvelle compétence pour les communes : la gestion des milieux aquatiques et la prévention des inondations

La loi de modernisation de l’action publique territoriale et l’affirmation des métropoles (MAPTAM) du 27 janvier 2014 attribue au bloc communal [Communes avec transfert aux établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) à fiscalité propre auxquels elles sont rattachées (communautés de communes et communautés d’agglomération pour la Corse)] une compétence exclusive et obligatoire relative à la gestion des milieux aquatiques et la prévention des inondations (GEMAPI).

La création et l’attribution de la compétence GEMAPI aux communes clarifient les responsabilités que les maires assument déjà partiellement en la matière, et fournissent les outils juridiques et financiers nécessaires pour leur exercice. La mise en oeuvre de la réforme concentre, à l’échelle communale et intercommunale, des compétences aujourd’hui morcelées.
Les communes et leurs groupements pourront ainsi concilier urbanisme (meilleure intégration du risque d’inondation dans l’aménagement de son territoire et dans les documents d’urbanisme), prévention des inondations (gérer les ouvrages de protection) et gestion des milieux aquatiques (assurer l’écoulement des eaux et gérer les zones d’expansion des crues).

Cependant, comme c’était le cas jusqu’ici, l’entretien régulier des cours d’eau non domaniaux (ce qui est le cas de tous le cours d’eaux en Corse) reste en premier lieu du ressort des propriétaires riverains. La collectivité n’a vocation à intervenir qu’en cas de défaillance du propriétaire, ou pour des opérations d’intérêt général ou d’urgence.
À partir du 1er janvier 2018, ces travaux seront exclusivement confiés aux communes et à leurs établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre (communautés de communes ou d’agglomération pour la Corse). Sans attendre cette échéance, une prise de compétence anticipée est également possible.

Les risques littoraux : la submersion marine et l’érosion littorale

Sur les mille kilomètres de côtes de la Corse, on peut différencier :

  • le littoral sableux oriental, quasi rectiligne entre Bastia et Solenzara ;
  • et un littoral rocheux sur le reste du pourtour de la Corse, à falaises abruptes sur certains secteurs (falaises calcaires de Bonifacio et falaises de la réserve naturelle de Scandola et du golfe de Porto), entrecoupé de plages sableuses ou à galets.

Des risques littoraux d’érosion et de submersion marine sont identifiés sur la Plaine orientale et en quelques points en fond de baie du littoral rocheux, notamment sur la façade occidentale.

Ces risques font partie des thèmes abordés dans le cadre de la gestion intégrée des zones côtières (GIZC). Le principe de la GIZC est d’associer des acteurs multiples autour d’un projet commun dans le but de partager un diagnostic sur la situation d’un territoire, puis de définir de manière concertée les objectifs à atteindre et, enfin, de conduire les actions nécessaires.

Il semble important de rappeler que la submersion marine et l’érosion côtière sont deux phénomènes intimement liés : l’un amplifie l’autre et inversement. Cet aspect doit nécessairement être intégré dans les actions des services de l’État et des collectivités locales.

 

La submersion marine

La submersion marine désigne une inondation temporaire de la zone côtière par la mer dans des conditions météorologiques et marégraphiques extrêmes. C’est un aléa d’inondation au même titre que le débordement de cours d’eau ou le ruissellement.
La submersion marine est d’ailleurs traitée en tant que tel dans la directive européenne « inondation » ou par la future compétence communale de la GEMAPI.

Restaurant de plage exposé à l'érosion côtière à Aleria,
sur la côte orientale, en 2007
Source : BRGM

La tempête du 27 et 28 novembre 2008 est un événement majeur qui a affecté la Plaine orientale de la Corse. Issus d’une dépression originaire du sud, des vents violents soufflent durant les deux journées et lèvent une mer importante. Les vagues sont maximales sur la partie nord de la côte orientale, et elles impactent fortement la ville et le port de Bastia où elles atteignent 8 m à 8,50 m. Les dégâts occasionnés par cette tempête sont très importants, en particulier sur les infrastructures portuaires de Bastia, mais aussi Erbalunga ou Solenzara. La capitainerie du vieux port de Bastia est envahie par 15 cm d’eau, des restaurants sont inondés et des pêcheurs sinistrés. Des installations touristiques en bordure littorale sont également touchées par les vagues déferlantes.

Par ailleurs, les conséquences dramatiques de la tempête Xynthia ont montré la nécessité d’améliorer la prévention du risque de submersion marine.Des plans de prévention des risques littoraux (PPRL) ont ainsi été prescrits sur les façades maritimes du pays afin notamment de mieux prendre ce risque dans l’aménagement du territoire.

En Corse, la prise en compte de ce risque est assez récente. Bien que les données nécessaires à une caractérisation précise de l’aléa submersion marine restent insuffisantes, avec notamment un manque de mesures houlographiques et marégraphiques, les premières actions initiées ont permis d’améliorer la connaissance de ce phénomène naturel.

Ainsi, sur le littoral de la Plaine orientale, de Bastia à Solenzara, une étude de caractérisation des impacts des tempêtes, notamment en termes de submersion marine, a été réalisée par le BRGM, en partenariat avec l’OEC et l’Agence de l’eau Rhône Méditerranée et Corse. Elle définit les phénomènes associés aux surcotes de tempêtes marines, et les secteurs les plus exposés à la submersion. En partenariat avec la DDTM de Haute-Corse, cette étude a été étendue par la suite au reste du département de la Haute-Corse, soit de Bastia à Galéria, en englobant ainsi les plages de poche caractéristiques de la côte rocheuse.

En 2014, la réalisation d’un Atlas des zones submersibles (AZS) à l’échelle du littoral corse, a permis d’identifier l’ensemble des zones à enjeux susceptibles d’être soumises à la submersion.
Sur les secteurs prioritaires, l’objectif est d’affiner la connaissance de l’aléa submersion marine par des études locales. À terme, les nouveaux éléments de connaissance issus de ces études, déjà réalisés en Haute-Corse et à venir en Corse-du-Sud, seront pris en compte via une révisionde l’AZS.

En Corse-du-Sud, dans le cadre d’un projet partenariat entre la DDTM et le BRGM, une évaluation de l’aléa submersion marine a été lancée en 2016 sur le littoral des communes allant de Zonza à une partie de Bonifacio. Par la suite, les autres secteurs littoraux à enjeux du département seront également étudiés.

Par ailleurs, un point en lien direct avec la submersion marine qu’il semble important de prendre en compte est celui de la montée du niveau des eaux suite au réchauffement climatique.
La Corse, comme toutes les régions côtières, sera directement impactée par ce phénomène. Une marge supplémentaire est donc prévue dans toutes les études liées aux inondations par submersion marine. L’hypothèse retenue est celle d’une augmentation du niveau marin égale à 60 cm à l’horizon 2100 (sur la base de l’hypothèse « pessimiste » de l’Observatoire national sur les effets du réchauffement climatique, ONERC).

 

L’érosion littorale

Le littoral corse est sujet à un aléa érosion dépendant du contexte géomorphologique, géologique et de l’exposition aux conditions hydrodynamiques :

  • aléa potentiellement plus important sur les côtes sableuses et sur les côtes à falaises calcaires;
  • aléa potentiellement moins important sur les côtes à falaises granitiques.

La houle est un facteur déterminant dans l’évolution morphologique du littoral. Son action résulte dans la combinaison de plusieurs processus entraînant la mise en suspension et le déplacement des sédiments sur la plage émergée, mais également sur la partie sous-marine située dans la zone de déferlement des vagues.

La connaissance de l’aléa érosion sur les côtes sableuses a fait l’objet d’études historiques menées par le BRGM afin de déterminer des tendances à l’échelle de plusieurs décennies. La connaissance de cet aléa est affinée à l’échelle annuelle grâce à la mise en oeuvre par le BRGM, en partenariat avec l’OEC, le Conseil départemental de Haute-Corse et la Communauté d’agglomération du pays ajaccien (CAPA), d’un Réseau d’observation du littoral (ROL) de la Corse. Mis en place depuis 2002, ce réseau permet le suivi de l’évolution morphologique des plages et de la position du trait de côte sur plusieurs sites répartis sur le pourtour littoral de la Corse.  

Cet observatoire s’étend à des sites « régionaux » (sites représentatifs de la géomorphologie littorale régionale) et des sites « sensibles » (sites en érosion chronique, sur lesquels des enjeux sont régulièrement exposés). Le réseau comprend dix-sept sites, dont sept sites régionaux et huit sites sensibles. Deux sites sur la côte ajaccienne, intégrés en 2012 dans le réseau, répondent à une priorité spécifique de la CAPA. Chaque année, ces sites font l’objet de levés topo-bathymétriques du sommet de la dune jusqu’à 20 m de profondeur ainsi qu’un levé du trait de côte.


Exemple des évolutions du trait de côte observées sur le site du Tavignano (ROL).

Depuis 2014, toutes ces informations sont accessibles sur Internet :

Les évolutions interannuelles de la position du trait de côte dans le cadre du ROL montrent bien le caractère non homogène spatialement et temporellement du phénomène d’érosion, ainsi que l’importance du suivi régulier du trait de côte. La problématique vient du fait de la présence d’enjeux fixes sur cette interface mobile.

 

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