Les ressources agricoles

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Des productions à forte typicité 

Des activités agricoles diversifiées essentiellement non intensives

L'agriculture est diversifiée : élevage, arboriculture, viticulture, maraîchage, grandes cultures. Elle est essentiellement non intensive : parcellaire plus ou moins morcelé, petite taille d'exploitation, faible densité des vergers, tradition pastorale et races animales locales qui valorisent les parcours y compris pentus et d'altitude.
Parallèlement, les productions végétales, alors qu'elles n'occupent que moins de 8 % de la SAU des exploitations, forment après transformation, 78 % de la valeur produite (193 millions d'euros en 2019) par la « ferme Corse » (248 M€) avec la viticulture en première position (41 %) suivie de l'arboriculture (24 %) de la production de viande (11%) et des produits laitiers (9,5%) 3.

 

Type de production Production Valeur 2019 (millions d’€ hors subventions) Evolution 2018/2019 en volume Evolution 2018/2019 en prix
Animale Cheptel et viande 27,25 +0,4% +1,9%
Produits avicoles 1,81 0,0% +1,7%
Lait et produits laitiers 23,31 +2,3% -1,5%
Autres produits de l’élevage (miel, ,..) 2,26 0,0% 0,0%
Total produits animaux bruts et transformés 54,63 +1,2% +0,3%
Végétale Plantes fourragères 12,79 -3,2% +6,4%
Produits maraîchers et horticoles 18,32 +3,8% +2,9%
Fruits 58,92 -15,7% +4,2%
Vins d’appellation 76 +3,2% +1,8%
Autres vins 25,26 -24,2% +4,0%
Autres produits végétaux 1,87 -1,5% -7,0%
Total produits végétaux bruts et transformés 193,16 -7,8% +3,1%

Tableau 8 : Bilan économique des filières

 

Il convient de distinguer une agriculture de plaine et coteaux spécialisée, plutôt structurée et mécanisée, souvent irriguée en plaine mais faiblement utilisatrice d'espace, d'un élevage « pastoral » généralement extensif et fondé sur l'utilisation de grands espaces de parcours. Le premier cas concerne les grandes cultures annuelles ou pérennes et les cultures légumières, mais aussi des cultures fourragères utilisées pour l'élevage. L'essor des filières apicole et plantes aromatiques est sensible, avec :

  • une production annuelle de miel qui, depuis l'obtention de l'appellation d'origine en 1998 a largement augmenté et se maintient autour de 340 tonnes/an 4. La production de miel en AOC-AOP « miel de Corse » représente un peu moins des 3/4 de la production totale et concerne un apiculteur sur trois ;
  • l'augmentation très marquée des surfaces plantées en plantes aromatiques (notamment l'immortelle, Helicrisum italicum) entre 2000 et 2015, période durant laquelle ces surfaces passent de 24 à 400 hectares (ha). En 2015, les surfaces en immortelle « bio » représentent 189 ha. 

Sur la période 2015-2020 on dénombre 20 installations au titre du dispositif Jeunes Agriculteurs (JA). La moitié concerne des projets agricoles avec des activités diversifiées (élevage, maraîchage, arboriculture traditionnelle). On observe une tendance à l'augmentation avec 6 installations par an en 2019 et en 2020.

Des élevages principalement extensifs sur libre parcours

La Corse est marquée par la prépondérance d'un élevage pastoral. Il bénéficie de nombreux atouts : races rustiques adaptées au milieu, tradition pastorale forte, typicité et qualité des produits, ressources alimentaires abondantes, etc. Pour autant, l'élevage est confronté à de réelles difficultés : fermeture des milieux, perte de savoir-faire et de traditions locales, notamment concernant la transhumance, introduction de races exogènes plus productives, forte variabilité saisonnière de la ressource alimentaire, niveaux de complémentation parfois élevés, déficit de production laitière...

Les parcours occupent une place prépondérante dans la plupart des systèmes pastoraux et notamment dans le cas des élevages bovins et caprins. Les ressources alimentaires ligneuses offertes par les différents types de maquis (fruits, jeunes pousses, feuillage...) complètent utilement un fourrage herbacé dont le déficit est structurel en Corse. La production de concentrés et la production fourragère insulaire (foin commercialisé) apparaissent marginales malgré l'importance de la demande locale. C'est pourquoi une importante quantité de fourrage est achetée chaque année hors de Corse. En moyenne sur les 10 dernières années, 10.500 t/an sont importées. L'importation oscille entre 6.750 t et 14.400 t par an 5 en provenance essentiellement de la Crau.

L'élevage pastoral ovin et caprin destiné à la production laitière pour la fabrication de fromages fermiers et semi-industriels, est traditionnel en Corse. 70% des exploitations se situent en Haute-Corse pour plus de 73 % des effectifs. Comme ailleurs en Méditerranée, certains espaces littoraux précédemment exploités par les troupeaux une partie de l'année (automne, hiver et printemps) ont été abandonnés au profit de l'urbanisation, du tourisme ou des cultures à forte valeur ajoutée. Les troupeaux se retrouvent le plus souvent cantonnés dans les terres où le foncier subit une pression moindre mais où les surfaces sont plus difficilement mécanisables. 

Le régime alimentaire des ovins de race corse est basé très majoritairement sur l'utilisation de l'herbe avec une faible capacité à valoriser les ligneux. Mais la brebis corse se rencontre aussi bien dans les zones de l'intérieur, conduite selon des modalités d'élevage pastoral (utilisation de la ressource fourragère spontanée) que dans les zones de plaine sur des cultures fourragères plus intensives. L'irrigation, l'évolution des techniques culturales, l'introduction depuis une vingtaine d'années de matériel végétal d'origine méditerranéenne adapté aux conditions pédo-climatiques de l'île sont autant d'atouts pour permettre un développement de la filière.

Il faut noter que le schéma de sélection de la race ovine corse poursuit sa structuration et autorise des gains de productivité pour les troupeaux inscrits au contrôle laitier (162 litres /brebis /an 6). Pour les caprins de race corse qui ont une forte capacité à valoriser les ressources ligneuses des parcours, les secteurs de pâturage sont principalement des milieux aux reliefs attractifs (fond de vallons, lignes de crêtes...), et présentant une offre alimentaire diversifiée, importante et accessible. Certaines unités d'élevage caprines, situées en zone de plaine, développent des systèmes mixtes basés sur la culture de l'herbe et sur l'exploitation directe de la végétation spontanée, herbacée et ligneuse.

Les élevages caprins de race corse sont néanmoins en diminution car le lait est mal valorisé et de plus en plus d'éleveurs choisissent d'utiliser des races exogènes à forte production laitière. N'étant pas autant adaptées au milieu que la chèvre corse, ces races exogènes sont souvent élevées en stabulation avec affouragement. Cela pose la question de la typicité des produits ainsi que de la valorisation et l'entretien de l'espace par les troupeaux.
 

Produit 2019 Evolution 2015-2019
Ovins (nombre de têtes) 110,989 -0,7%
Production de lait (en millions de litres) 9,95 +13,2%
Caprins (nombre de têtes) 47,107 +7,8%
Production de lait (en millions de litres) 6,01 +20,0%

 Tableau 9 : Bilan cheptel caprin et ovin


En 2020, Il y a 17 laiteries qui transforment 240000 Tonnes de fromages 7 dont :

  • 32% de pâte molle
  • 28% de pâte pressée
  • 15% de brassé
  • 12% de Brocciu
  • 6% de fromage aux herbes
  • 4% autres
  • 15 de ces 17 laiteries sont en AOC brocciu 

Face à l'engouement pour les fromages corses et malgré l'évolution des tonnages de lait produits localement, les industriels vont chercher en Sardaigne ou sur le continent une part croissante du lait de brebis qu'ils transforment (1,5 millions de litres importés en 2010, 2,88 millions en 2015 et 4,04 millions en 2019, soit 29% du volume utilisé 8. Une telle pratique n'est pas autorisée dans le cadre de l'AOP Brocciu, seule appellation d'origine aujourd'hui reconnue dans cette filière. On observe aussi depuis 2012 une tendance à la diminution de la part des fromages fermiers sur le marché de la transformation du lait au profit des fromages industriels ou semi-industriels.

L'élevage bovin s'est surtout développé dans le dernier quart du XXe siècle concomitamment à la mise en place des dispositifs d'aides communautaires. Depuis 2015, le cheptel qui se trouve en grande partie en Haute-Corse (65%), a diminué de 10,9% alors que le nombre de détenteurs d'animaux a augmenté de 3,6%. Par ailleurs, l'existence de troupeaux en liberté sans propriétaire ou parfois l'absence de gestion de certains troupeaux bovins sur les parcours (absence de clôtures...) induit une divagation animale dont les conséquences peuvent être très préoccupantes (accidents de la circulation, dégradations diverses...). L'élevage porcin poursuit son développement et se retrouve plus concentré dans des exploitations plus spécialisées. En 2019, on dénombre 56.495 têtes de bétail en augmentation de 11,9% depuis 2015, détenues par près de 580 agriculteurs (+41,1% depuis 2015). 55% des exploitations sont situées en Corse-du Sud pour 63% du cheptel. Les pratiques d'élevage reposent le plus souvent sur une conduite en parcours, notamment sous chênaies et châtaigneraies en période de finition. La reconnaissance en 2006 de la race Nustrale a contribué à la mise en place de l'AOP sur les principales pièces de charcuterie (prisuttu, coppa et lonzu di Corsica) ; mais la filière souffre encore d'un déficit de production et de diffusion des reproducteurs.

Le nombre d'adhérents de l'Association Régionale (ARGRPC) et au Syndicat de défense et de promotion des charcuteries de Corse - Salameria Corsa est passé de 108 à 164 entre 2015 et 2019 d'après l'association régionale de Gestion de la Race de Porc Corse. La part des porcs charcutiers nustrale (AOP) est de 7,2%.

De nombreuses exploitations sont détentrices d'équins pour un peu moins de 2.000 têtes au total (chevaux, ânes, hybrides), en baisse de 2% depuis 2015. Ils sont essentiellement destinés aux activités de loisirs mais une part non négligeable est également utilisée pour l'agriculture notamment comme substitution aux véhicules motorisés dans les zones peu praticables. La reconnaissance du cheval corse a été obtenue en 2012. Un schéma de gestion de la race est déployé (inscription des reproducteurs au livre généalogique).
 

5 Source : Réseau fourrage région corse, 2019
6 OS brebis Corse pour 56 agriculteurs inscrits au contrôle laitier, 2020
7 Source : ILOCC Comité National de la brebis laitière, 2020
8 ILOCC - Observatoire Interprofessionnel 
 

Des châtaigneraies de production affectées par le cynips

Traditionnellement prédominantes en Castagniccia, les châtaigneraies de production recouvrent environ 1 400 ha (+ 17,9% depuis 2015). La châtaigne, dont la culture est généralement conduite de façon très extensive, est valorisée quasi-intégralement sous forme de farine. On estime également que le châtaignier est présent sur près de 6 000 ha de parcours destinés aux animaux, en particulier les porcins. Les pertes de vigueur des arbres et les mortalités ont conduit à une chute de production estimée entre 60 et 80 % (800 tonnes récoltées en 2010 contre 150 en 2014, 172 en 2015, 107 en 2018 mais 248 tonnes en 2019).

Depuis 2010, où il a été détecté pour la première fois en Corse, le cynips (Dryocosmus kuriphilus), insecte ravageur du châtaignier, s'est répandu (232 communes recensées infestées en 2014 contre 132 en 2012). Depuis 2011, une stratégie de lutte biologique s'est progressivement mise en place à l'aide d'un insecte auxiliaire parasitoïde, le Torymus sinensis negli.

En 2014, une campagne de lâchers massifs de Torymus a été effectuée (plus de 400 lâchers), elle a été reconduite tous les ans par la FREDON Corse jusqu'en 2018. Cette méthode reposant sur la régulation des populations, les bénéfices ne peuvent s'observer qu'au terme de plusieurs années. Néanmoins, sur le terrain, des effets positifs sont déjà visibles.
 

Une plus-value identitaire et environnementale à consolider et à faire valoir

Le terroir naturel, par son climat et son relief, oriente l'agriculture vers des productions qui ne sont pas des productions en volume. En Corse, c'est le terroir plus que le marché qui crée l'opportunité agricole. Ainsi, le modèle prédominant est inscrit dans une démarche qualité de valorisation des ressources locales. Il s'appuie sur la reconnaissance de variétés domestiques locales (cépages corses, variétés d'olives et de châtaignes, clémentine, races animales, abeille de Corse) adaptées aux terroirs naturels et sur les savoir-faire traditionnels de transformation. Caractérisée par de petits volumes, des coûts de production et de transports élevés et affectée par des modes de consommation plus tournés vers une offre générique que vers une offre de produits de terroirs, l'agriculture corse reste compétitivement fragile.

Les efforts portés sur la qualité et la traçabilité doivent permettre de la consolider et de résorber la part d'agriculture informelle qui subsiste encore aujourd'hui (abattage clandestin, importations de lait non conformes au cahier des charges du produit, etc).

En Corse, quatre exploitations sur dix sont engagées dans une production sous signe officiel de qualité : AOC/AOP, indication géographique protégée (IGP), Label rouge ou AB.14

La filière viticole, l'élevage de petits ruminants avec la fabrication de brocciu et l'agriculture biologique (AB) représentent à eux trois plus de 60 % des exploitations impliquées dans cette démarche.

 

(Photo Oliveraies en Balagne (OEC, J. Salvini) 78)

 

Sur la période 2012-2020, quatre nouvelles reconnaissances ont été obtenues : IGP noisette de Cervioni, IGP pomelo de Corse, Label rouge sur la clémentine et le kiwi. D'autres démarches de reconnaissance sont en cours : AOC pour les fromages et pour l'oignon du Cap Corse, IGP pour l'agneau et le cabri, Label rouge pour l'amande, IGP pour la charcuterie industrielle.
 

  AOC et AOP IGP Label rouge
Vins Vin de Corse (seul ou complété de Coteaux du Cap Corse, Calvi, Sartène, Figari, Porto-Vecchio) Île de Beauté  
Patrimonio  
Ajaccio  
Muscat du Cap Corse  
Autres produits d’origine végétale Huile d’olive de Corse, Oliu di Corsica (2004) Clémentines de Corse (2007) Clémentine (2014)
Farine de châtaigne de Corse, Farina castagnina corsa (2006) Noisette de Cervioni (2014) Kiwi de Corse (2020)
  Pomelo de Corse (2014)  
Produits d’origine animale Miels de Corse, Mele di Corsica (1998)   Poulet jaune fermier
Brocciu (fromage de lactosérum de brebis ou de chèvre) (1998)    
Prisuttu, Jambon sec de Corse (2012)    
Coppa di Corsica, Coppa de Corse (2012)    
Lonzu, Lonzo de Corse (2012)    

 Tableau 10 : produits sous signe de qualité AOP, IGP, Label Rouge

 

Par ailleurs, depuis 2015, une réelle dynamique de conversion vers l'agriculture biologique est observée, en particulier dans les filières fruits secs (châtaigne, amande, noisette) mais aussi en viticulture et en élevage bovin. En 2015, on dénombrait 292 exploitations agricoles certifiées « bio » ou en conversion, pour une superficie de 11.922 hectares en agriculture biologique sur l'ensemble de l'île. En 2018, 457 exploitations pour 25.998 ha et en 2019, 529 exploitations pour une surface de 28.350 ha sont en production AB soit une augmentation respectivement de 81% et 138% depuis 2015.


  Figure 24 : Agriculture biologique en 2019 (source Agence Bio)

 

  Nombre d’exploitations Surfaces certifiées bio Surfaces en conversion Total surfaces certifiées bio + surfaces en conversion Transformation Distribution
C1 C2+C3 Total
2019 Evol. % 2019 Evol. % 2019 2019 2019 Evol. % 2019 Evol. % % SAU
2A 179 -1,1 10.230 20,3 1.786 2.317 4.102 26 14.333 22 20,1 32 17
2B 350 26,8 10.999 57,8 1.419 1.595 3.015 -59 14.014 -1,6 11,7 54 20
Corse 529 15,8 21.230 37,2 3.205 3.912 7.117 -32 28.347 9 14,8 86 37

 Tableau 11 : Bilan 2019 de l'agriculture biologique (Agence Bio)

 

3.4. Source : Agreste, Annuaire agricole, 2020
5. 
Source : Réseau fourrage région corse, 2019
6. OS brebis Corse pour 56 agriculteurs inscrits au contrôle laitier, 2020

7. Source : ILOCC Comité National de la brebis laitière, 2020
8. ILOCC - Observatoire Interprofessionnel

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