L'urbanisation

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LE CADRE RÉGLEMENTAIRE

En Corse, l'incidence des effets négatifs de l'étalement urbain est accrue en raison d'un mode d'urbanisation peu coordonné par les collectivités locales, conséquence d'une longue absence de politique foncière et urbanistique, de l'absence de planification intercommunale et du manque de véritables objectifs d'aménagement. 

La plupart des logements collectifs ont été édifiés sans tenir compte de leur desserte. La voirie, établie a posteriori, se fraie un passage entre les immeubles, quand cela est possible. La mise en place de transports en commun est devenue un véritable casse-tête avec, au bout du compte, un niveau de service trop faible pour constituer une alternative à la voiture particulière. Les maisons individuelles partent à l'assaut des montagnes et du littoral dans un dédale de voies d'accès, compliquant la mise en œuvre de tous les services et aggravant fortement la facture énergétique. Les nouvelles constructions suivent, dans l'ensemble, les tendances de l'architecture contemporaines, sans spécificité ni recherche de continuité avec l'existant, menant à des ensembles incohérents. 

D'autres difficultés sont inhérentes à la Corse. L'une tient à la géographie très accidentée et très fragmentée de l'île et à la vigueur des particularismes qui mettent en exergue la nécessité d'une action publique coordonnée. L'autre tient au découpage communal. Dans la plaine orientale, les territoires communaux prennent la forme de lanières qui s'étendent depuis la montagne perpendiculairement au rivage. La zone urbanisée se développe de façon extensive, le long de la route côtière. Elle prend toutes ces communes en enfilade, de façon indistincte, au mépris de tous les principes de la planification urbaine. 

Cette diversité territoriale, avec un nombre élevé de communes et des territoires contraints souvent enclavés, n'a pas facilité la coopération entre communes ou bassins de population, d'où l'absence de stratégies territoriales à l'échelle des micro-régions pour établir des projets d'aménagement cohérent. 

L'aménagement en Corse est donc un sujet majeur compte tenu de la pression foncière importante, en particulier dans les communes du littoral et des contraintes fortes (topographie, patrimoine naturel, risques, servitudes) sur l'ensemble du territoire insulaire, qui nécessite d'être encadré. Le PADDUC vise à répondre, en partie, à ces problématiques. 

En raison des multiples difficultés que connaît la Corse en matière foncière, immobilière, de développement urbain et notamment de logement et de développement économique, liées à la topographie simultanément littorale et montagnarde de l'île, à par la superposition des textes législatifs et réglementaires à appliquer localement (code de l'urbanisme, loi littorale, montagne, dispositions agricoles, règles environnementales, etc..) ou aux incertitudes sur leur compatibilité (PADDUC/documents locaux d'urbanisme) ainsi qu'à la faiblesse des moyens juridiques et ingénierie de nombreuses petites communes, le Président de la République et plusieurs élus se sont rencontrés à Cozzano en avril 2019, comme mentionné précédemment. Outre un appui de l'État aux petites communes en matière d'urbanisme et d'aménagement, notamment pour les PLU, il est aussi envisagé des ateliers des territoires thématiques à la carte pour ces mêmes communes, en complément de l'appui réalisé par l'AUE Corse. 

Les grandes orientations et lois relatives à l'urbanisme et au logement

Les politiques publiques en matière d'urbanisme tendent à privilégier une certaine densité en matière d'habitat (habitat collectif, semi-collectif, habitat individuel groupé) et la mixité sociale et fonctionnelle. Néanmoins, le modèle de la maison individuelle constitue encore un type d'habitation recherché par une large majorité des ménages, conformément au processus d'individualisation qui a marqué la société à partir des années soixante. 

Ainsi, les préceptes du développement durable devront être adaptés à une géographie et une culture spécifiques. C'est la qualité du projet qui pourra emporter l'adhésion de ceux qui vont y vivre et seront les véritables acteurs de sa durabilité. 

Les cinq principales orientations de l'État en matière d'aménagement -la prise en compte des risques naturels et technologiques étant bien évidemment un préalable- sont les suivantes : 

  • assurer la prise en compte et la conciliation des objectifs de production de logements (y compris sociaux) et de préservation des ressources naturelles dans les documents de planification et d'urbanisme (objectifs Grenelle et ALUR) ;

  • promouvoir des documents d'urbanisme volontaristes à des échelles plus larges : schéma de cohérence territoriale (SCoT) sur les bassins de vie et plans locaux d'urbanisme (PLU) intercommunaux ; mettre en œuvre l'urbanisme de projet et promouvoir les formes urbaines denses et de qualité, économes de l'espace et des ressources;
  • impulser l'émergence de nouveaux projets intégrant les enjeux de l'aménagement durable de type ÉcoQuartiers qui veillent à favoriser la mixité sociale, la diversité des fonctions urbaines, la qualité du cadre de vie des habitants et la préservation de l'environnement.
  • assurer la prise en compte et la conciliation des objectifs de production de logements (y compris sociaux) et de préservation des ressources naturelles dans les documents de planification et d'urbanisme (objectifs Grenelle et ALUR) ; 
Les principales lois sur le logement et l'aménagement depuis le début du 21e siècle : 
  • 13 décembre 2000, Promulgation de la loi n° 2000-1208 relative à la solidarité et au renouvellement urbains («Loi SRU») dont les maîtres mots sont mixité urbaine et offre d'habitat diversifiée.
  • 5 mars 2007, Promulgation de la loi n° 2007-290 instituant le droit au logement opposable («Loi Dalo») et portant diverses mesures en faveur de la cohésion sociale.
  • 18 janvier 2013, Promulgation de la loi n° 2013-61 relative à la mobilisation du foncier public en faveur du logement et au renforcement des obligations de production de logement social, publiée au Journal officiel le 19 janvier 2013. 166
  • 24 mars 2014, Promulgation de la loi pour l'accès au logement et un urbanisme rénové - loi ALUR
  • 27 janvier 2017, Promulgation de la loi relative à l'égalité et à la citoyenneté (JO du 28).
  • 23 novembre 2018, Promulgation de la loi portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique (loi ELAN).

La loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique (loi ELAN) a quant à elle introduit la possibilité de créer des orientations d'aménagement et de programmation (OAP) visant à favoriser la densification dans les PLU (article L151-7 du code de l'urbanisme).

En outre : 

  • La loi n° 2009-967 du 3 août 2009 dite « Grenelle 1 » dans son article 7 a inscrit, parmi les objectifs du droit de l'urbanisme, la lutte contre la régression des surfaces agricoles et naturelles et la lutte contre l'étalement et la déperdition d'énergie avec une gestion économe des ressources et de l'espace. 
  • La loi n° 2010-788 du 10 juillet 2010 dite « Grenelle 2 », dans ses articles 17 et 19, impose aux documents d'urbanisme (schémas de cohérence territoriale et plans locaux d'urbanisme) de présenter une analyse de la consommation d'espaces naturels, agricoles et forestiers pendant les dix dernières années et de justifier des objectifs chiffrés de limitation de cette consommation. 
  • La loi n° 2014-366 du 4 mars 2014, dite loi « ALUR » et la loi n° 2014-1170 du 13 octobre 2014 d'avenir pour l'agriculture, l'alimentation et la forêt (LAAF) sont venues renforcer les dispositions relatives à la lutte contre l'étalement urbain et favorables à la préservation des espaces naturels et agricoles dans les SCoT et PLU. Cela se traduit notamment par le fait que les les PLU doivent analyser la consommation d'espaces naturels, agricoles et forestier au cours des dix dernières années, la capacité de densification et de mutation des espaces bâtis, exposer les dispositions qui favorisent, d'une part, la densification des espaces bâtis et d'autre part, la limitation de la consommation des espaces non bâtis. En outre, les PLU doivent fixer des objectifs chiffrés de modération de la consommation d'espaces et de lutte contre l'étalement urbain (articles L151-4 et L151-5 du code de l'urbanisme). Des obligations analogues sont assignées aux SCOT (article L141-3 du code de l'urbanisme).

 

Au vu du constat que l'on peut faire sur l'urbanisation des trente dernières années, la prise en compte de ces objectifs, dans leur ensemble, constituerait une inflexion majeure dans les pratiques urbanistiques de la Corse. Les travaux engagés par les collectivités qui révisent leur document d'urbanisme visent à réaliser des efforts significatifs en termes de réduction de la consommation de l'espace.

Certaines communes ont réduit d'environ 25 % voire 40 % leur consommation. 

Le PADDUC

 

Fruit d'un long travail de concertation entre tous les acteurs du territoire, le PADDUC est un projet de société à l'horizon 2040. C'est un document d'urbanisme qui dit le droit des sols en précisant par exemple, compte tenu des spécificités géographiques de l'île, les modalités d'application de la loi « Montagne » et de la loi « Littoral ». Une carte, établie au 1 : 100.000, fixe la destination générale des différentes parties du territoire. Des orientations réglementaires, contenues dans le livret IV, détaillent les prescriptions relatives à chacun des zonages définis par cette carte. Ces zonages permettent d'établir un respect des équilibres fonctionnels entre usages des sols, qui distinguent des espaces à vocation principalement urbaine et économique (tache urbaine actuelle hors bâti isolé et secteurs d'enjeux régionaux), espaces à vocation agricole (espaces stratégiques agricoles et espaces-ressources pour le pastoralisme et l'arboriculture traditionnelle), espaces à vocation naturelle (et/ou agricole) (espaces naturels faisant l'objet d'une protection forte, espaces stratégiques environnementaux, espaces naturels, sylvicoles ou pastoraux, espaces remarquables ou caractéristiques au sens de la loi « Littoral »). 

Ainsi, ce plan apparaît comme un document protecteur des espaces naturels et agricoles, notamment en fixant un objectif chiffré de préservation d'espaces stratégiques agricoles sur l'ensemble du territoire corse (au moins 105 000 hectares sur un total de 868 000). 

En 2018, le tribunal administratif de Bastia a prononcé une annulation de la carte des Espaces Stratégiques Agricoles (ESA), annulation confirmée par la Cour Administrative d'Appel de Marseille. Une nouvelle cartographie des ESA a été soumise à enquête publique en 2019. Elle doit être approuvée par l'Assemblée de Corse en 2020. 

Le PADDUC sert aujourd'hui de cadre de référence. Depuis le 24 novembre 2018, toutes les communes doivent avoir mis leur document d'urbanisme en compatibilité avec le plan. Il fournit, sous réserve des recours engagés, un environnement réglementaire relativement stabilisé pour des documents d'urbanisme confrontés par contre à une contestation fréquente devant le juge administratif, ainsi que des précisions dans l'application du Règlement National d'Urbanisme (RNU). 

Les documents locaux de planification

 

 Figure 38 : État d’avancement des documents d’urbanisme
(DDTm)

Mi-2020, dans 220 communes corses (sur 360) c'est le RNU (règlement national d'urbanisme) qui s'applique puisque moins de 40 % des communes disposaient d'un document de planification opposable (soit 140 communes sur 360), dont 56 PLU et 84 cartes communales. Il s'agit principalement des communes littorales et des communes urbaines ; les documents d'urbanisme couvrent ainsi environ 60 % de la population.

Par ailleurs, pour les communes ne disposant pas d'un document d'urbanisme : 55 d'entre elles se sont lancées dans l'élaboration d'un PLU ; 58 autres ont choisi de réaliser une carte communale Au vu des procédures en cours, 253 communes sur 360 devraient disposer, à terme, d'un document de planification en Corse (soit 70% des communes). 

Enfin, il convient de noter l'annulation (partielle ou totale) de plusieurs documents d'urbanisme (exemples : les PLU annulés en totalité de Propriano (2019), Porto-Vecchio (2014), le PLU partiellement annulé de Sisco (2019). 

 

L'élaboration d'un PLU qui doit être en compatibilité avec le PADDUC et l'ensemble du code de l'urbanisme ou la réglementation environnementale est souvent d'une grande complexité technique et administrative pour les petites communes, qui, confrontées aux pressions locales, peut amener leurs élus à choisir délibérément de ne pas finaliser leurs PLU, pour laisser l'État prendre les grandes décisions d'urbanisme. Ainsi, la complexité administrative et réglementaire amène à la pénurie de terrains constructibles, ce qui peut alimenter la hausse des prix du foncier, alors que théoriquement les documents d'urbanisme visent à combattre la spéculation. 

 

A noter que des assises de l'urbanisme, associant des représentants des maires, la Collectivité de Corse et l'État, se sont tenues en Corse en 2019 afin d'étudier les actions à engager pour répondre aux difficultés exprimées par les maires en matière d'urbanisme, liées à la complexité de l'empilement réglementaire : réglementation environnementale, littorale, liée à la montagne ou à l'agriculture. 

 

Dans le cadre de ces assises a notamment été validée la mise en place d'une assistance à maîtrise d'ouvrage, financée par l'État, destinée à accompagner 20 communes de Corse dans l'élaboration ou la révision de leur PLU.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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